Autant vous prévenir de suite, Danielle Collins n'est pas facile à suivre. Sur le court, c'est entendu, quand elle se met à lâcher ses grandes accélérations de coup droit. Mais aussi d'une manière générale.
Happy Danielle !
L'Américaine Danielle Collins jouera son premier quart de finale à Roland-Garros.
Considérée dans son ensemble, sa carrière a quelque chose d'énigmatique. Avant l'Open d'Australie 2019, où elle avait atteint sa première demi-finale en Grand Chelem, elle n'avait jamais remporté un seul match dans un tournoi majeur.
Avant ce Roland-Garros où elle jouera demain son premier quart de finale, elle n'avait pas remporté un seul match post-confinement. Et d'une manière générale, elle présentait un bilan assez famélique sur terre battue, avec pour meilleur résultat un quart de finale à Charleston l'an dernier. Et encore, sur terre battue verte.
Le déclic sur ocre
Mais tout a changé cette année pour l'Américaine, qui s'est donc qualifiée pour les quarts de finale en sortant coup sur coup deux spécialistes de la surface, Garbiñe Muguruza en huitièmes (7/5, 2/6, 6/4) puis, ce mardi, Ons Jabeur (6/4, 4/6, 6/4).
Les deux fois en faisant montre d'une volonté assez impressionnante puisqu'elle était menée 3-0 (double break) au troisième set par l'Espagnole, et 2-1 (break) au troisième set par la Tunisienne. Après avoir, elle, même mené 6/4, 3-0 face à cette dernière.
Difficile donc de décerner à l'Américaine la palme de la joueuse la plus constante du circuit, ce qui se reflète parfois dans la physionomie de ses matchs. Mais si sa force de frappe est terrible (165 km/h de moyenne en première balle ce mardi), il serait en revanche réducteur de la cataloguer comme une cogneuse sans plan B. Collins a aussi une "main", comme on dit, et elle lui a été bien utile pour résister aux mille et une facéties que lui a proposées Jabeur, pour le coup assez exceptionnelle dans l'art de varier le jeu.
En mode caméléon
Déjà, au premier tour, la grande Floridienne d'1,78 m avait su se tirer des griffes d'une autre adepte des variations, la Roumaine Monica Niculescu, qui l'avait rendue folle pendant un set avec ses slices de coup droit et ses balles arrondies avant qu'elle ne finisse par trouver la solution (2/6, 6/2, 6/1).
Bref, lors de ce Roland-Garros, Danielle Collins s'adapte à tout. Aux adversaires, aux conditions changeantes et aux frimas météorologiques qui l'ont poussée à deux reprises (contre Muguruza et contre Jabeur) à commencer un match en extérieur sur le court Suzanne-Lenglen avant de le finir sous le toit du court Philippe-Chatrier. Un fait probablement unique en Grand Chelem !
Un coach improbable
Cette faculté d'adaptation est incontestablement le reflet d'une maturité nouvelle et assez tardive pour une joueuse de 26 ans qui se sent encore en "apprentissage" sur le circuit WTA, où elle s'est pleinement lancée sur le tard, après avoir suivi un long cursus universitaire, deux titres NCAA à la clé. Mais désormais, la 57e joueuse mondiale semble avoir imbriqué les différentes pièces de son jeu.
Et un homme n'est peut-être pas étranger à cette alchimie : l'ancien joueur espagnol Nicolas Almagro. Triple quart-de-finaliste à Paris, le jeune retraité de 35 ans est récemment devenu l'improbable coach de l'Américaine, qu'il a rencontrée par l'entremise de Patrick Mouratoglou.
"Nico a eu une influence fantastique sur mon tennis, déjà parce qu'il comprend ce que je ressens sur le court, se réjouissait celle qui est déjà assurée de réintégrer le top 50. Nous avons notamment travaillé ma force mentale sur le court. J'ai beaucoup de chance de pouvoir m'entraîner avec un ancien joueur de ce calibre."
Cinquième joueuse non tête de série à atteindre cette année les quarts de finale à Roland-Garros (un record depuis le passage à 32 numérotées en 2002), Danielle n'est pas la moins fautive dans ce jeu de massacre : après Muguruza (n°4) et Jabeur (n°30), elle affrontera une troisième tête d'affiche consécutive, et pas des moindres : sa compatriote Sofia Kenin (n°4). Il s'agira de la première confrontation féminine 100 % US en quarts de finale à Paris depuis un Jennifer Capriati-Serena Williams en 2004. Encore un tout autre style de jeu proposé à Danielle Collins. Mais soyez-en sûr : elle s'adaptera.