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Etiez-vous là ? Retour sur le premier match de Rafael Nadal à Roland-Garros.
23 mai 2005 : dix jours avant son dix-neuvième anniversaire, l'Espagnol Rafael Nadal jouait son tout premier match à Roland-Garros. Nous sommes sur le court numéro 1, à deux pas du Central, qui n'est pas encore "son" court. Nadal n'est alors pas encore un mythe, mais son style est déjà né.
Les géants de l'histoire du jeu sont bien souvent passés par là. Vilas, Lendl, Wilander, Kuerten, Agassi ou Djokovic ont tous été bizutés sur un court annexe, incognito. Pas Rafael Nadal, déjà demi-Dieu très médiatique avant même son premier match Porte d'Auteuil... Un phénomène jamais vu depuis Björn Borg en 1973 et qui n'aurait peut-être pas été si vivace s'il était venu en 2003 ou 2004, deux années où le petit prodige alors classé au-delà de la cinquantième place mondiale a dû déclarer forfait à cause de son coude et de sa cheville gauche.
En 2005, c'est précédé d'une incroyable réputation qu'il débarque à Roland-Garros, celle d'un prodige illuminé et perfectionniste. Vainqueur des Petits As à 13 ans en 2000, passé pro l'année de ses quinze ans, Nadal est alors le plus grand espoir du tennis mondial... avec Richard Gasquet, dont la présence dans la même partie de tableau que "Rafa" "inquiétait un peu" ce dernier, selon son oncle et entraîneur Toni. Tiens, à ce sujet, le staff de 2005 est à peu de choses près le même qu'aujourd'hui ! Carlos Costa est déjà son agent. Le vainqueur de l'édition 1998, Carlos Moya, ex-partenaire d'entraînement à Majorque, tient déjà son rôle de"grand frère" et de modèle."Carlos m'a dit qu'il y avait une super ambiance à Roland-Garros et que j'allais aimer ça", confie-t-il sur France 2 juste après son premier match.
Mais à seulement 18 ans, Nadal a déjà le professionnalisme d'un champion qui aurait toujours été là et la vista d'un briscard qui aurait déjà tout vu et tout connu. Parti de la 51e place en janvier, Nadal s'illustre d'abord en mars en osant mener deux sets à zéro en finale du tournoi de Miami contre Maître Federer en personne, avant d'avaler à la suite, insatiable, Monte Carlo, Barcelone et Rome.
Arrivé à Paris avec le dossard de numéro 5 mondial, le jeune adulte passe son printemps à semer l'effroi. Sur son passage, il a notamment fait du petit bois avec les deux derniers vainqueurs de Roland-Garros, Gaston Gaudio (6/3 6/0 à Monte-Carlo) et Juan Carlos Ferrero (6/1 7/6 6/3 en finale à Barcelone).
Finalement, il y a peu de différences entre le "sioux" aux cheveux longs et aux traits encore poupons de 2005, et la superstar planétaire de 2017. Même regard de prédateur jeté à ses adversaires, même mine habitée, même envie de bien faire. Revoir les images de son premier match permet de se rappeler que le service est moins lourd et son jeu de volée plus fragile. C'était déjà bien trop fort pour le pauvre Allemand Lars Burgsmüller (29 ans, 96e mondial) corrigé en trois sets (6/1 7/6 6/1) sans avoir obtenu la moindre balle de break.
Mais pour l'intéressé lui-même, ce premier match, disputé sur le court 1, qu'il ne foulera plus jamais par la suite, n'était pas une bonne entame. En sortant du court, "Rafa" fronce les sourcils. Pas content ? "Pourrais-je l'être, alors qu'il y avait tant d'approximations et d'hésitations dans mon jeu ? On ne peut pas dire en tout cas, après un tel match, que je suis l'un des favoris du tournoi."
Sur France 2, quand l'intervieweur Nelson Monfort lui demande en ce 23 mai 2005 s'il n'est pas fatigué après sa riche saison sur terre, Nadal abat alors son sourcil en circonflexe, témoignage habituel de son étonnement. "Fatigué ? Je ne sais pas..." Tout Rafael Nadal est déjà contenu dans cette petite scène... Fatigué, lui ? Bien vite, plus personne ne jugera utile de lui poser la question.