Il y a un an, presque jour pour jour, Alexander Zverev avait été contraint d'abandonner en demi-finale face à Rafael Nadal, après une violente entorse de la cheville. Passé par une longue période de doutes pour retrouver les sommets, l'Allemand a réussi à se hisser jusqu'au dernier carré de Roland-Garros, pour la troisième année consécutive. Retour sur son itinéraire chaotique puis magnifique.
Zverev, le réveil du lion
Alexander Zverev s'apprête à jouer sa troisième demi-finale d'affilée Porte d'Auteuil, un an après sa grave blessure à la cheville.
La première fois que le lion a rugi, c’était au beau milieu de la forêt. Poussé du fin fond de la Porte d’Auteuil, dans la jungle du court Simonne-Mathieu, un hurlement a percé la flore des serres tropicales. Un cri strident pour effacer celui de l’an dernier, quand un Central muet d’effroi était resté abasourdi en voyant Alexander Zverev se rompre les ligaments de la cheville. C’était en demi-finale, dans ce qui aurait dû être un match de légende engagé depuis 3h13 déjà face à Rafael Nadal (7/6, 6-6 ab.). Alors que l’Allemand allait atteindre son apogée au rang de n°2 mondial, il avait fait ses adieux au court en larmes et en béquilles.
Une blessure au corps, à l'ego et à l'esprit. "Le lion", surnom qui colle de plus en plus à son pelage, "probablement en raison de ma coupe de cheveux et parce que je hurle quand je gagne", est redescendu dans la hiérarchie du circuit. Un nouveau statut qu'il a dû avaler pour repartir à la chasse. "Il faut accepter qu'on ne peut pas retrouver le niveau où on était jusque-là. Pendant les sept premiers mois qui ont suivi ma blessure, je n'ai pas pu jouer. Les trois ou quatre mois d’après, j'avais mal tout le temps. Je ne pouvais pas bouger comme je le voulais. Parfois, j’avais besoin de me rappeler qui j'étais avant et le type de matchs que j’avais pu gagner."
Se souvenir du bon vieux temps, quand sa crinière blonde et sa stature (1,98 m) inspiraient la crainte chez tous ceux qui croisaient son chemin. Un passage indispensable pour retrouver son instinct. "J’ai repris confiance depuis que je n’ai plus mal. Ça a pris beaucoup plus de temps que je le pensais. Quand je suis revenu en Australie, je jouais encore sur une jambe. A Indian Wells et Miami, j’avais encore mal, je ne pouvais pas faire ce que je voulais. Ça a aussi pris du temps de retrouver la confiance en mes jambes, en ma cheville et de pouvoir glisser sur le court comme j’avais l’habitude de le faire. J’ai dû passer par tout ça mais j’avais coché Roland-Garros. Et maintenant, pendant les matchs, je suis juste heureux d'être sur ce court, de pouvoir y jouer à nouveau."
Prédateur nocturne
A l’annonce de son passage sur le Central pour une virée nocturne, Sascha n’a pas pu empêcher l’accélération de son rythme cardiaque. "J’avais un peu d’anxiété de revenir sur ce court. C'est pour ça qu’avant le match, je suis allé dessus pour le voir. Parce que je n’y étais pas allé depuis l'accident et c'était très important pour moi."
Mais une fois libéré du poids du douloureux passé, le fauve s’est remis à traquer ses proies. Et c’est dans la nuit parisienne qu’il a renoué avec son rang de prédateur redouté. En enchaînant les victoires et en domptant ceux qui ont tenté de contester son règne (Harris, Molcan, Tiafoe (n°12), Dimitrov (n°28) puis Etcheverry), il a retrouvé une grande partie de sa superbe.
S’il admet avoir vécu "l’année la plus difficile de sa vie", Zverev est désormais lancé dans sa conquête. Sans se fixer de limite, il avance, bourré de confiance et fort de services à 220 km/h, aux portes d'une première finale à Roland-Garros. "Aujourd’hui, je ne pense plus à ma blessure. Je suis simplement ravi d'être de retour là où j'étais l'an dernier. J'ai une nouvelle occasion d’aller en finale et j'espère pouvoir la saisir."
Un adversaire bien plus calme mais non moins féroce l’attend en demi-finales. Casper Ruud maîtrise son tournoi d’une main de maître et n’a jamais vacillé. Dans la cage du Philippe-Chatrier, le lion devra prouver qu’il mérite de prétendre au trône.