Un tour, un match de légende : Graf - Hingis (Finale 1999)

Le contexte

A 29 ans, Steffi Graf dispute sa neuvième finale à Roland-Garros. Titrée pour la première fois en 1987, elle a de nouveau soulevé la coupe Suzanne-Lenglen en 1988, 1993, 1995 et 1996. L’Allemande a également remporté 4 Open d’Australie, 7 Wimbledon et 5 US Open.

Alors qu’elle avait confié en début de tournoi ne plus vraiment croire en ses chances de s’imposer sur terre battue après n’avoir disputé qu’un tournoi sur cette surface en cette saison 1999, la championne allemande a impressionné pour rallier la finale, éliminant successivement Lindsay Davenport et Monica Seles, respectivement 2e et 3e mondiales en quart et demi-finale. 

Numéro une à la WTA, Martina Hingis a déjà remporté cinq titres du Grand Chelem dont le dernier en début d’année à Melbourne où elle a battu Amélie Mauresmo en finale. Multi-surfaces, la Suissesse, déjà finaliste à Paris en 1997, fait figure de favorite de cette édition 1999 après ses victoires sur terre à Charleston et Berlin. Elle n’a d’ailleurs pas abandonné un set de la quinzaine, ne laissant que cinq jeux à Arantxa Sanchez, tenante du titre, en demi-finale. 

Le match 

Débuté avec près d’une heure de retard en raison d’une grosse averse, la finale tant attendue démarre sur de très hautes bases en termes de niveau de jeu et Martina Hingis multiplie les revers long de la ligne pour déborder son adversaire. Malgré une belle résistance de l’Allemande, c’est la Suissesse qui prend les devants dans cette finale en remportant le premier set 6/4. Mais, déjà, des signes de nervosité apparaissent chez la plus jeune des deux joueuses, à l’image de cet avertissement récolté à la suite d’un jet de raquette dans le cinquième jeu.

Et ça ne va pas s’arranger… A 2-0 en sa faveur dans le deuxième set, Martina Hingis sort de ses gonds sur une annonce d’arbitrage. Elle passe même de l’autre côté du filet pour aller vérifier la marque sous les yeux d’une Steffi Graf incrédule avant d’aller s’asseoir sur sa chaise en attendant l’arrivée du superviseur et du juge-arbitre… Ceux-ci confirment la décision de l’arbitre et la numéro une mondiale écope d’un point de pénalité et des sifflets du public qui a définitivement choisi son camp.

La bataille fait rage sur le court et Martina Hingis, bien que de plus en plus nerveuse, s’accroche. A 5-4, elle passe même à trois points du titre sur son service mais, quelques minutes plus tard, c’est Steffi Graf qui égalise à une manche partout sous les vivats du public parisien. Le match vient de basculer définitivement. Très marquée physiquement, la Suissesse est de nouveau huée lorsqu’elle quitte le court après le premier jeu de la troisième manche alors que Steffi Graf, revenue avant elle des vestiaires, partage une ola avec les spectateurs. L’Allemande s’amuse et fait la course en tête.

A 5-2, 30-40 alors que Martina Hingis, épuisée physiquement et nerveusement, sert pour rester dans le match, elle tente un… service à la cuillère ! Surprise, Steffi Graf commet la faute et le public bascule dans l’hystérie. Quelques secondes plus tard, nouvelle balle de match pour l’Allemande. Sous les huées du public, Martina récidive avec un deuxième service à la cuillère. Celui-ci est annoncé faute et la Suissesse monte sur la chaise d’arbitre pour contester. Elle se replace finalement pour servir une deuxième balle classique avant de commettre la faute en revers. Steffi Graf sautille sur place. Elle vient de remporter son sixième titre à Roland-Garros.

Martina Hingis, elle, touche le fond, et s’enfuit du court. Consolée par sa mère, elle finira par revenir avec elle sur le court Central pour assister à la remise des prix. Courageuse, elle remerciera même le public dans un petit discours en français très réussi avant de recevoir, enfin, les applaudissements d’un public touché par la détresse de cette jeune joueuse de 18 ans. 

Déclaration

Steffi Graf : "C’est le titre du Grand Chelem le plus inattendu de ma carrière. A l’entraînement je n’avais pas de bonnes sensations. C’est incroyable. C’est ma plus grande victoire."

Statistique

12 : le nombre d’années qui séparent le premier titre de Steffi Graf à Roland-Garros en 1987 avec son dernier. Avant elle, seule Chris Evert avait réussi la même chose en s’imposant pour la première fois en 1974 avant de soulever la Coupe Suzanne-Lenglen pour la septième et dernière fois en 1986. 

La suite 

Remontée à la troisième place mondiale au lendemain de Roland-Garros, Steffi Graf, 107 titres en simples dont 22 titres du Grand Chelem, enchaîne avec une dernière finale à Wimbledon avant de faire ses adieux au circuit après un abandon lors du tournoi de Carlsbad en août. "Après Wimbledon, ce ne furent pas des semaines faciles parce que, pour la première fois, je n'éprouvais plus ni plaisir ni joie. Un sentiment curieux pour moi. Peut-être la motivation m'a-t-elle fait défaut après la victoire de Paris, ce que j'y ai vécu était si intense que j'ai eu, à ce moment-là, le sentiment que je ne pourrais plus rien retrouver d'équivalent."

Battue d’entrée à Wimbledon par Jelena Dokic (129e), Martina Hingis rebondira, elle, en s’imposant à Toronto et Carlsbad avant d’atteindre la finale de l’US Open. Mais la jeune prodige, encore finaliste à Melbourne en 2000, 2001 et 2002 ne remportera plus aucun titre du Grand Chelem en simple. 

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