ITW Daria Kasatkina : "Faire mieux dans les grands rendez-vous"

La demi-finaliste de la dernière édition de Roland-Garros est en quête de constance dans les tournois majeurs.

Daria Kasatkina / Demi-finale Roland-Garros 2022©Nicolas Gouhier / FFT
 - Reem Abulleil

En guise de résolution pour cette nouvelle année, Daria Kasatkina s'est fixé comme objectif d’obtenir de meilleurs résultats lors des grands rendez-vous.

De retour dans le top 10 après avoir atteint les demi-finales de Roland-Garros, soit sa meilleure performance dans un tournoi du Grand Chelem, elle fondait beaucoup d’espoirs en vue de l’Open d’Australie 2023.

Finaliste à Adélaïde pour son deuxième tournoi de l’année après avoir écarté notamment Barbora Krejcikova et Petra Kvitova, la joueuse de 25 ans était alors dans les meilleures dispositions pour briller à Melbourne Park.

Malheureusement, son entrée en lice a été repoussée en raison de la chaleur, puis de la pluie. Après avoir patienté plus de 24 heures, Daria Kasatkina a été sèchement sortie de la compétition en moins d’une heure par sa compatriote Varvara Gracheva (6-1, 6-1).

"J’ai eu beaucoup de mal à maintenir ma concentration pendant cette attente. Mon adversaire avait peut-être un peu moins de pression, mais elle a tout de même mieux géré la situation. C’est l’enseignement que je dois en tirer", a confié l’intéressée à rolandgarros.com à l’occasion du Mubadala Abu Dhabi Open cette semaine.

"Le mental est un aspect fondamental pour tout athlète et je dois encore faire des progrès en ce sens."

Daria Kasatkina / Demi-finale Roland-Garros 2022©Corinne Dubreuil / FFT

Si elle ne s’est pas éternisée sur sa défaite, elle admet avoir été piquée au vif, compte tenu de ses ambitions dans ces tournois.

"Comme d’habitude, j’ai pleuré pendant une demi-heure sous la douche et le lendemain, ça allait mieux, explique-t-elle. On se sent vide, mais il faut généralement attendre un jour ou deux pour se remettre d'une défaite comme ça, dans un tournoi de cette importance."

"On se fixe des objectifs, on veut gagner. C’est particulièrement vrai dans les grands tournois. Je sais que je peux mieux faire dans ces grands rendez-vous et c’est évidemment mon but. Il y a une petite pression supplémentaire et lorsqu’on n’obtient pas le résultat escompté, on ressent une grosse déception pendant quelques jours. C’est normal. C’est un peu comme une rupture. Il faut se donner du temps pour se remettre et recommencer à apprécier les choses du quotidien."

Daria Kasatkina a fait beaucoup de chemin depuis sa première percée dans le top 10 à la fin de l’année 2018. Remplaçante lors des WTA Finals cette saison, la droitière a enchaîné les déconvenues l’année suivante, songeant même à raccrocher sa raquette.

Submergée par la pression, elle a pendant un temps perdu son enthousiasme avant de revenir au combat. Ses efforts ont finalement payé en 2022, avec deux demi-finales à Rome et à Roland-Garros, deux titres ainsi qu’une qualification pour les WTA Finals.

Contrainte de faire face à elle-même, Daria Kasatkina se retrouve particulièrement dans le parcours d’Aryna Sabalenka, qui a remporté l’Open d’Australie le mois dernier après avoir connu des problèmes de service en 2022.

"Je ne sais pas si les spectateurs s’en rendent compte, mais nous qui observons les choses de l’intérieur, nous pouvons affirmer qu’elle se donne à mille pour cent pour gagner ces tournois", affirme-t-elle au sujet de la lauréate de l'AO. Elle en parle souvent car c’est très important pour elle. Dans les précédents tournois, on a pu voir qu’elle était parfois un peu trop tendue, du fait de la pression. C’est normal de ressentir de la nervosité quand on désire quelque chose à ce point. Quand elle a gagné, c’est comme si on avait enlevé un poids de ses épaules. Elle mérite amplement ce titre. C’est l’une des joueuses les plus travailleuses du circuit."

Aryna Sabalenka / Finale Open d'Australie 2023©Corinne Dubreuil / FFT

Kasatkina ne peut d’ailleurs pas s’empêcher de sourire lorsqu’on lui demande si la carrière de Sabalenka constitue une source d’inspiration pour elle. L’actuelle n°8 mondiale souligne la difficulté d’évoquer publiquement une autre joueuse, mais reconnaît que cette concurrence est bénéfique pour toutes.

"À ce titre, je peux remercier Anett (Kontaveit), par exemple. Nous sommes amies, donc je peux le dire. Elle était N°2 l’année dernière et ça m’a encouragée à repousser mes limites car je voulais la même chose. Je me disais : 'J’y suis presque'."

"Quand on est une jeune joueuse qui débarque sur le circuit, on voit Angelique Kerber, Simona Halep et Serena Williams, et on se dit qu'on n'atteindra jamais leur niveau. Elles sont trop fortes. Mais quand on voit des joueuses avec lesquelles on a grandi, avec lesquelles on était en concurrence et qu’on battait parfois, quand on les voit gagner des grands titres ou obtenir de bons classements, on se dit que rien n’est impossible. C’est comme ça que ça marche."

Sur le circuit WTA, tout va en effet très vite. Il n’y a pas si longtemps, le tennis féminin semblait se résumer à un duel entre Iga Swiatek et le reste du monde. Sacrée à Roland-Garros et à l’US Open, la Polonaise paraissait inarrêtable et s’était confortablement installée en haut de la hiérarchie mondiale, terminant l’année 2022 avec plus de points que ses deux poursuivantes réunies.

Daria Kasatkina & Iga Swiatek / Demi-finale Roland-Garros 2022©Corinne Dubreuil / FFT

Mais depuis le début de la saison 2023, les choses ont bien changé. Des joueuses comme Aryna Sabalenka, Elena Rybakina, Jessica Pegula ou encore Victoria Azarenka ont livré d’excellentes prestations au mois de janvier.

"Tout le monde a pu constater qu’à un moment donné, Iga était devenue intouchable. À ce moment, elle dominait complètement son sujet, évoque-t-elle à propos du circuit. Mais nous sommes toutes humaines. Les autres joueuses progressent et elles aussi, elles veulent gagner. Quand on gagne tout le temps, la pression devient de plus en plus forte car on s’attend à vous voir gagner. C’est normal, ça n’a rien à voir avec elle. C’est impossible de tout gagner... sauf si on s’appelle Rafa, Roger ou Novak ! Mais Iga a des statistiques excellentes, incroyables même."

"Dans ce sport, tout le monde veut gagner. Ce n’est pas comme le sprint. Là, si vous êtes la plus rapide, vous avez le meilleur temps et c’est plié. C’est un jeu, tout le monde veut gagner. Le tennis est très compétitif. Chaque semaine, il y a une nouvelle course et rien n’est jamais acquis d’avance."

Kasatkina conserve d’excellents souvenirs de son aventure à Roland-Garros l’année dernière, où elle s’était hissée jusque dans le dernier carré sans concéder le moindre set.

"Je n’ai pas trop souffert sur le court, ce qui m’a permis d’économiser mon énergie. C’est un facteur très important, explique-t-elle concernant son parcours sur la terre battue parisienne. Plus on gagne facilement, plus on se sent fraîche au moment d’aborder le match suivant."

Kasatkina était arrivée à Paris gonflée à bloc après sa demi-finale à Rome, où elle avait manqué une balle de match face à Ons Jabeur avant de s’incliner. Malgré tout, sa victoire contre Paula Badosa en huitième de finale a considérablement renforcé sa confiance.

Daria Kasatkina, Roland-Garros 2022, Simple Dames, 1/8 de Finale Nicolas Gouhier / FFT

"Je ne peux pas dire que je me sentais particulièrement bien ou que j’ai livré des matchs incroyables à Roland-Garros. Non, j’ai fait des matchs corrects, mais c’est peut-être la meilleure chose qui pouvait m’arriver. Prenez Novak Djokovic, par exemple. C’est comme ça qu’il gagne la plupart de ses tournois et pas seulement ceux du Grand Chelem. Parfois, il doit sortir le grand jeu au premier tour ou en finale, mais la plupart du temps, il se contente de faire des matchs corrects."

"Ça suffit pour gagner. Mon entraîneur appelle ça des 'partidos comerciales', des matchs professionnels : 6/3... 6/3... 6/4... 6/3 ! Il y a un peu de résistance, mais tout le monde sait qu’il va finir par gagner."

"C’est important de s’économiser sur le court et jusqu’à la demi-finale, c’est ce qui s’est passé pour moi."

Daria Kasatkina, demi-finales, Roland-Garros 2022©Nicolas Gouhier / FFT

Bien qu’il soit difficile pour elle de prédire sa forme à quelques mois de la prochaine édition de Roland-Garros, Kasatkina espère réitérer ses prestations de l’édition précédente.

"En tout cas, c’est l’un de mes tournois préférés et je ferai de mon mieux, ajoute-t-elle. Mais rien n’est jamais acquis d’avance, même si on s’est préparée soigneusement et qu’on a bien joué l’année précédente. Malheureusement, ça ne marche pas comme ça. Heureusement, il y a beaucoup de semaines et beaucoup de tournois pour se refaire."

Daria Kasatkina, demi-finales, Roland-Garros 2022©Corinne Dubreuil / FFT