En 2023, Arthur Fils a commencé à se faire un nom sur le circuit mondial en remportant son premier titre sur la terre battue de Lyon et en intégrant le Top 40. À bientôt 20 ans (il les fêtera le 12 juin), le Français espère aller beaucoup plus haut, notamment sur l’ocre de Roland-Garros, un tournoi qui lui tient particulièrement à cœur. Une terre de jeu qu’il espère bien, un jour, transformer en terre d’exploit.
Arthur Fils : "Si j'avais un tournoi à gagner, ce serait Roland"
Le magazine de Roland-Garros a rencontré Arthur Fils. À 19 ans, le Français rêve de remporter un Grand Chelem.
Si tu ne devais choisir qu’une seule surface ?
La terre battue parce que j’ai passé 4-5 ans à m'entraîner à Roland-Garros et je suis plutôt un adepte de cette surface sur laquelle mon jeu colle bien. Sur terre, il y a la notion du combat, ce sont des matchs souvent difficiles où il faut vraiment se battre. Avant, je ne savais pas trop glisser, mais maintenant, c’est mieux. Ce que j’aime moins en revanche - un peu comme tout le monde - ce sont les faux rebonds qu’il faut réussir à gérer. Mais, à "Roland", il n’y en a pas, c’est la meilleure terre battue du monde !
Si tu n’étais qu’un seul coup de raquette ?
Le coup droit ! Surtout sur terre, tu peux vraiment manœuvrer un point, décaler à gauche, à droite, réaliser un court croisé, jouer long de ligne. C’est vraiment un bon coup tactique. Je ressens un réel plaisir quand j'envoie un bon coup droit parce que ça veut dire que je me mets dans une position où je construis le point pour obtenir le coup d’attaque qui va me permettre d’achever l’échange. C’est un peu comme une partie d’échecs. Sur terre, il fait plus mal que mon revers. J’arrive à imprimer pas mal d’effet, donc ça fait un peu plus de dégâts. C’est pour ça que je l’aime bien.
Si, d’un coup de baguette magique, tu pouvais changer quelque chose à ton tennis ?
Mon toucher de balle, parce que mes amorties ne sont pas incroyables. Je le travaille, bien sûr, mais si d’un seul coup, je pouvais avoir le toucher d’Hugo Gaston, je signerais tout de suite.
Si tu ne devais retenir qu’un moment à Roland-Garros ?
Quand j’étais au Centre national d’entraînement (CNE), à l’âge de 16-17 ans, j’étais avec mes potes et le soir, vers 20 heures, j’adorais quand on allait voir les fins de matchs ensemble et que l’on mettait l’ambiance dans les tribunes. Quelle chance on avait de pouvoir regarder les meilleurs joueurs du circuit disputer l’un des plus grands tournois au monde, le meilleur pour moi. Ce sont vraiment de bons souvenirs. Sinon, en tant que joueur, je dirais mon match contre Davidovich Fokina l’an dernier. C’était beau, j’ai vraiment senti une ambiance particulière, j’avais le public derrière moi et même si j’ai perdu, cela reste un bon moment. On s’entraine toute l’année pour vivre de belles émotions, des grosses ambiances. J’aime beaucoup Indian Wells, car le cadre est paradisiaque, avec les montagnes autour, on a un peu l’impression d’être en vacances, mais si j’avais un tournoi à gagner, ce serait Roland-Garros. En plus, j’ai grandi à "Roland". Gagner un jour ce tournoi, ce serait incroyable.
Si tu devais choisir ton adversaire en finale à Roland-Garros ?
Pour que ce soit emblématique, je dirais Rafael Nadal. Après, je ne suis pas sûr de gagner le match (rires) !
Si tu pouvais choisir un adversaire pour le match de ta carrière ?
Mon idole, c’était Roger Federer. Si j’avais pu jouer un match contre lui, j’aurais été vraiment heureux. Ce n’est plus possible, il est parti un peu avant que j’arrive, mais sinon je l’aurais choisi.
Si tu devais réaliser un rêve dans ta carrière ?
Gagner un Grand Chelem. Peu importe que ce soit Roland-Garros ou un autre. C’est notre rêve à tous. Pendant plus de 10 ans, ce sont les mêmes qui ont raflé tous les Grands Chelems, donc ce n’est pas quelque chose de facile. C’est une pression quand tu as les aptitudes pour le gagner. Moi pour l’instant, je suis aux alentours de la 35e place mondiale, donc je n’ai aucune pression. Les mecs qui sont dans le Top 5, je pense que ça doit être différent pour eux. J'essaie de faire au mieux et de tenter de passer la première semaine pour le moment.
Si tu pouvais choisir ton sparring-partner ?
Carlos Alcaraz, parce qu’il fait partie des tout meilleurs et que pour s’entraîner tous les jours, ça doit être pas mal (rires). On est de la même génération, il a un an de plus que moi et c'est incroyable ce qu’il fait. C’est un grand champion qui a déjà gagné des Grands Chelems, donc si je pouvais choisir, je le prendrais, mais ce sont en général les coachs qui se parlent entre eux pour organiser ces choses-là.
Si tu devais parier sur le joueur de la nouvelle génération qui gagnera le plus de Grands Chelems ?
Je pense encore à Carlos. Il a déjà gagné deux titres du Grand Chelem, alors que pour moi cela reste encore un rêve d’enfant. Je m’entraîne bien, je fais tout à fond pour un jour essayer de me battre pour en gagner un. Il me faut pour cela encore emmagasiner par mal d’expérience.
Si tu devais rejouer un seul match ?
Celui en Coupe Davis contre Daniel Evans l’an dernier. C’était ma première sélection et je menais un set à rien et un break d'avance dans le second. Finalement, ça a tourné en un claquement de doigt. C’est dommage, car si j’avais gagné, on aurait été à 2-0 parce qu’Ugo (Humbert) a ensuite remporté son match. J’ai mal géré les moments importants, au contraire de mon adversaire. La Coupe Davis est vraiment différente des matchs sur le circuit car on joue pour son pays et le but est de ramener un point à l’équipe dans une ambiance particulière. Mais tout ça fait partie de l’expérience...
Si tu te voyais dans cinq ans ?
J’aurais donc presque 25 ans... J’aimerais bien avoir quelques gros titres à mon palmarès et pouvoir être dans cette course aux Grands Chelems. Je ne serai pas blasé du circuit, non. Je me sens chanceux d’être là où je suis parce qu’on est des millions à essayer d’avoir cette vie-là. J’ai travaillé depuis mon plus jeune âge pour arriver ici ! Mais c’est sûr que c’est une belle vie, on joue les plus beaux tournois au monde, dans les plus belles villes au monde. C’est dingue quand on y réfléchit.
Si tu devais citer les joueurs avec lesquels tu t’entends le mieux sur le circuit ?
Je dirais Gaël Monfils, Alejandro Davidovich Fokina mais aussi des joueurs de ma génération comme Luca Van Assche et Ben Shelton. Avec Fokina, on passe de bons moments, on est souvent dans le même délire. Avec Ben, on a la même énergie, on est à fond et on rigole bien. Luca, j’ai grandi avec lui à partir de 12-13 ans et on a été très souvent ensemble, donc on se connaît par cœur. On prend souvent des nouvelles l’un de l’autre, on a une très bonne entente. Ce sont des joueurs que je considère comme des potes, mais cela ne veut pas dire que je ne sais pas faire la part des choses : quand je les affronte sur le court, c’est la compétition.
Si tu exerçais un autre métier que tennisman ?
J’ai toujours eu du mal à rester assis pendant de longues heures à écouter, derrière un bureau. Je ne sais pas trop. Peut-être que j’aurais opté pour un métier comme acteur. Oui, j’aurais bien aimé faire du cinéma ! Peut-être après ma carrière dans le tennis ?
Si tu étais une matière au lycée ?
J’aimais beaucoup les maths et la physique. J’ai eu un bac S, mention très bien, et j’avais sauté une classe, la 5e. Mes parents m’ont un peu poussé avec les études. Vers la fin, c’était tout de même un peu compliqué avec le tennis, je suis rentré au Cned à partir de la 4e ou de la 3e. Le deal avec mes parents, et surtout avec ma mère, c’était d’avoir mon bac pour pouvoir continuer à jouer au tennis.
Si tu étais une ville ou un pays ?
Les États-Unis. J’adore ce pays. J’aime beaucoup Miami et New York. Les Américains sont toujours en mode "détente" et positifs. La météo est sympa aussi et tout est grand : les parcs sont énormes, il y a des terrains de foot et de basket partout. C’est vraiment un pays sportif et c’est ce que j’apprécie là-bas, tu peux faire du sport partout. Je me verrais bien y vivre.
Si tu étais un loisir ?
J’adore le foot. Petit, j’étais un grand fan de Cristiano Ronaldo. Mon équipe de cœur, c’est le PSG. Je suis allé quelques fois au Parc des Princes. Je ne le pratique pas trop pour éviter les blessures, mais au foot, même quand tu es nul, tu peux t'amuser parce que tu n'es pas seul sur le terrain. Il y a cette notion de partage et au tennis c'est plus compliqué. Si tu n’es pas très bon, tu passes à côté de la balle et c’est frustrant, il y a moins de plaisir.
Si tu étais une musique ou un chanteur ?
J’aime la musique joyeuse avec de l’ambiance. Tiakola, du rap français avec de la mélodie, avec un bon rythme, tu peux danser dessus, ou Burna Boy. À écouter dans la voiture, pendant les vacances... pour tous les moments durant lesquels tu veux profiter de la vie.
Si tu étais un plat ?
Du riz djondjon avec des bananes pesées, un plat haïtien. C’est du riz avec des pois, du griot de porc et des bananes frites, c’est incroyable. Je n’en mange quasiment jamais, ce n’est pas très bon pour la ligne donc j’évite et puis je n’ai pas souvent l’occasion. C’est mon père et ma grand-mère qui cuisinent ça très bien. Ça me rappelle de bons moments de mon enfance.
Retrouvez cette interview et de nombreux autres sujets dans le Magazine de Roland-Garros 2024.