Nadal au pied d'une montagne

Après avoir décroché son 14e sacre à Roland-Garros dimanche, l'Espagnol est revenu sur la nature de sa blessure au pied, qui contrarie ses plans pour la suite de sa carrière.

Rafael Nadal Roland-Garros 2022©Pauline Ballet / FFT
 - Rémi Bourrieres

S'il s'est défendu, tout au long de son tournoi, de parler ouvertement de sa blessure au pied, Rafael Nadal s'est longuement livré après son 14e sacre à Roland-Garros dimanche face à Casper Ruud. L'Espagnol a confié qu'il avait joué toute la quinzaine sous anesthésiants, mais qu'il lui est désormais impératif de trouver une solution médicale plus pérenne.

Toutes les rumeurs possibles et imaginables ont escorté la 14e Glorieuse de Rafael Nadal à Roland-Garros dimanche. Y compris la plus folle d'entre toutes, selon laquelle il avait l'intention d'annoncer la fin de sa carrière immédiatement après la finale, quelle qu'en soit l'issue. Vaincu par cette douleur au pied gauche qu'il connaît certes depuis longtemps – il souffre du syndrome de Müller-Weiss, une ostéonécrose de l'os naviculaire qui l'avait déjà mis sur la touche pendant cinq mois l'an dernier –, mais devenu particulièrement insupportable ces dernières semaines.

La réalité n'est pas exactement celle-là, et même pas du tout. Rafael Nadal a fermement l'intention de continuer. Il serait d'autant plus dommage de s'arrêter maintenant alors qu'il se situe, pour la première fois de sa carrière, à mi-chemin du Grand Chelem, et avec une telle avance à la Race qu'il est en situation idéale pour reconquérir rapidement – même si c'est plus accessoire à ses yeux – la place de n°1 mondial.

Mais la terrible hypothèse selon laquelle on ne le reverrait plus, ou alors plus beaucoup, sur un terrain de tennis, n'est pas à occulter totalement non plus. Car l'Espagnol a confirmé, après sa victoire, ce que tout le monde avait plus ou moins vu pendant ses matchs : il a terriblement souffert tout au long de ce Roland-Garros, qu'il a disputé avec des injections quotidiennes d'anesthésiants pour couper court à la douleur de son membre meurtri.

L'homme aux désormais 22 titres du Grand Chelem a longtemps gardé le silence, mais s'est montré totalement transparent par la suite. Aussitôt après son sacre, la Coupe des Mousquetaires encore entre les mains, il a commencé à raconter à France Télévisions le calvaire qu'il avait traversé.

"Je n'imaginais pas pouvoir tenir à nouveau ce trophée entre les mains tant la quinzaine a été difficile, a-t-il ainsi déclaré sur le court auprès de Laurent Luyat, Justine Henin et Mary Pierce. Le moment le plus difficile a été, je pense, après mon match du 2e tour contre Corentin Moutet. Quand je suis rentré à l'hôtel, je ne pouvais pratiquement plus marcher. Heureusement, j'avais le médecin de la Fédération espagnole avec moi. On a passé beaucoup de moments ensemble !"

Ensuite, en conférence de presse, la légende de Manacor est longuement revenue sur le protocole médical extrêmement fastidieux auquel il a été obligé de s'astreindre durant tout le tournoi pour ne pas revivre le même cauchemar qu'à Rome, où il avait été sorti en huitièmes de finale par Denis Shapovalov, incapable de jouer à la fin de son match à cause de la douleur.

Un nouveau traitement à base de radio-fréquence

"J'ai joué ces deux semaines dans des conditions extrêmes, avec des injections quotidiennes d'anesthésiants au niveau du nerf pour couper la douleur, a-t-il ainsi expliqué. Aussi, je n'avais plus aucune sensibilité au niveau du pied. Je ne courais pas le risque d'aggraver la blessure, mais en revanche celui de me faire mal ailleurs. Quand vous n'avez pas de sensation au pied, vous avez par exemple plus de chances de vous tordre la cheville. C'est un risque que j'ai voulu prendre ici. Mais que je ne veux plus prendre par la suite. Il va donc falloir trouver une autre solution."

Le Majorquin a expliqué qu'il allait attaquer dès cette semaine un nouveau traitement à base de radio-fréquence, l'idée étant de désensibiliser le nerf de manière plus durable. Si ce traitement fonctionne, il continuera à jouer et même sans prendre de pause, puisqu'il a rappelé son désir intense de s'aligner à Wimbledon.

Mais si ça ne fonctionne pas ? A ce moment-là, son avenir s'assombrirait plus sérieusement. La question se poserait de subir une intervention chirurgicale assez lourde dans son cas, qui occasionnerait une absence prolongée sans aucune garantie de retrouver une mobilité suffisante pour rejouer au plus haut niveau. Sinon, l'autre alternative serait encore plus radicale : arrêter purement et simplement.

Personne - et sûrement pas lui - n'ose imaginer que la carrière de Rafael Nadal puisse prendre fin sur cet ultime sacre parisien. Mais elle s'inscrit pour le moins dans un certain flou, à court et à long terme. Le voilà en quelque sorte désormais au pied d'une montagne. Et c'est peut-être bien là le plus grand de ses défis.