Madrid : Iga et Carlos contre le reste du monde

Pendant 10 jours, tous les regards seront portés sur la Caja Magica où favoris et outsiders ont une occasion en or de briller, à un mois du tableau principal de Roland-Garros.

Iga Swiatek / Finale Stuttgart 2023©A.Warmuth / Panoramic
 - Romain Vinot

Organisé sur 12 jours, le tournoi de Madrid expérimente pour la première fois des tableaux à 96 participants. Une aubaine pour les joueuses et joueurs moins bien classés et un match de plus à disputer pour celui et celle qui brandiront le trophée samedi 6 et dimanche 7 mai. Et justement, si Iga Swiatek et Carlos Alcaraz font une nouvelle fois office de favoris indiscutables, la course à la gloire semble plus ouverte, notamment en raison de l’absence de prestigieux compétiteurs.

Des forfaits notables

Une fois n’est pas coutume, ce sont les absents qui ont le plus fait parler d’eux avant ce grand rendez-vous dans la capitale espagnole. Pressenti, le forfait de Rafael Nadal a été confirmé par l’intéressé lui-même sur ses réseaux sociaux. Toujours en convalescence d’une blessure au psoas (muscle de la hanche) contractée durant l’Open d’Australie, le Majorquin n’a pris part à aucune compétition officielle depuis janvier mais continue de s’entraîner et de récupérer en vue des prochaines échéances et notamment Roland-Garros. "La blessure n’est toujours pas guérie, explique-t-il dans une vidéo adressée à ses fans. Il y a quelques jours, nous avons décidé de changer de cap, de suivre un autre traitement et de voir si les choses s'améliorent pour essayer de passer à la suite".

Son grand rival Novak Djokovic – lui aussi en quête d’un 23e titre du Grand Chelem Porte d’Auteuil – ne sera pas non plus de la partie. De retour sur ocre à l’occasion du Masters 1000 de Monte-Carlo, le Serbe a été battu dès les huitièmes de finale par Lorenzo Musetti avant de subir une nouvelle défaite en quarts à Banja Luka, face à son surprenant compatriote et futur champion, Dusan Lajovic. "J'étais en dessous de mon niveau, a-t-il avoué après ce nouveau revers. Honnêtement, je ne me sentais pas bien sur le court, mes balles et mes jambes étaient molles. J'étais trop passif et j'ai fait beaucoup d'erreurs". Vainqueur à trois reprises du tournoi et éliminé dans le dernier carré l’an passé par Carlos Alcaraz, le numéro un mondial a préféré ne pas s’aligner à Madrid, lui qui semble toujours contrarié par une gêne au coude.

Un événement madrilène qui sera également privé de sa tenante du titre, Ons Jabeur. La Tunisienne, qui a fêté son retour sur le circuit avec un titre du côté de Charleston, a malheureusement été contrainte à l’abandon après seulement trois petits jeux contre Iga Swiatek en demi-finale à Stuttgart. "Après plusieurs examens médicaux, il s'avère que j'ai une petite déchirure au mollet et que je vais avoir besoin de plus de temps pour me rétablir. Je ne serai pas en mesure de défendre mon titre cette année" a-t-elle expliqué sur ses réseaux sociaux. Un nouveau coup dur pour la quatrième joueuse mondiale, déjà éloignée des courts suite à une opération mineure au genou subit après l’Open d’Australie.

A cette liste prestigieuse ce sont également ajoutés les forfaits plus ou moins prévus de Jannik Sinner, Matteo Berrettini et Marin Cilic chez les hommes et Belinda Bencic, Karolina Pliskova ou encore plus récemment Emma Raducanu, chez les dames.

Swiatek et Alcaraz, les ultra-favoris

Corrélées à leur forme étincelante, ces absences placent Iga Swiatek et Carlos Alcaraz comme les grandissimes favoris de cette édition 2023. L’an passé à la même époque, le Murcien faisait office d’ovni du circuit après ses sacres à Miami, Barcelone et son incroyable bilan de 23 victoires pour 3 défaites. Résultat, il était devenu le plus jeune champion de l’histoire du Madrid Open au terme d’un parcours dantesque durant lequel il avait pris le meilleur sur Rafael Nadal, Novak Djokovic et Alexander Zverev.

Carlos Alcaraz & Alexander Zverev / Madrid 2022©Antoine Couvercelle / FFT

Un an plus tard, l’ogre n’a pas perdu l’appétit, bien au contraire. Sacré à Indian Wells, il a réalisé le premier back-to-back de sa carrière en Catalogne et comptabilise déjà 23 victoires pour 2 défaites. Le dossard n°1 lui va à ravir et ne lui met aucunement la pression. "Je me sens bien, je suis à 100%, a-t-il expliqué à la presse hier. Avec le jeu produit et le titre à Barcelone, j’arrive ici avec beaucoup de confiance […] J'aime jouer devant de telles foules, et encore plus en Espagne. C'est une très grande motivation. Notre objectif est de nous amuser sur le terrain, mais aussi de divertir. Quand j'arrive à m'amuser sur le court, je joue mon meilleur tennis".

Bénéficiaire d’un bye au premier tour, le protégé de Juan Carlos Ferrero a quelques jours pour s’adapter à l’altitude madrilène. Il devra ensuite remporter 6 matchs pour conserver son bien.

L’altitude, il en sera également question pour la reine Iga. Habituée des sommets, elle a fêté son retour sur sa surface de prédilection par un nouveau sacre à Stuttgart. Avec 22 victoires en 23 matchs disputés sur ocre depuis 2022, elle apparaît imbattable, peu importe l’identité de l’adversaire de l’autre côté du filet. Mais la patronne du circuit n’a joué qu’une fois dans la capitale espagnole, battue au stade des huitièmes de finale en 2021 par Ashleigh Barty. Voilà bien longtemps qu’elle n’a pas démarré un tournoi sans avoir de nombreux points à défendre.

"Madrid est un tournoi piège à cause de l'altitude, alors je verrai bien, a-t-elle confié au podcast WTA Insider. J’ai beau être numéro un mondiale, je n'ai pas autant d'expérience dans le tennis qu'on pourrait le croire. Je vais donc voir. Mais mon entraîneur est un quelqu’un qui a beaucoup de connaissances. Je suis sûre qu'il va m'aider à gérer cela correctement et que je vais m'habituer aux conditions plus rapidement que je ne l'ai fait en 2021".

En cas d’acclimatation réussie, 1ga pourrait retrouver sur sa route Elena Rybakina en quarts, Jessica Pegula en demie et enfin Aryna Sabalenka en finale, comme en Allemagne.

Une opportunité à saisir

Si les deux têtes de série n°1 seront bien difficiles à déloger, les conditions de jeu, les efforts répétés à produire et la densité des tableaux pourraient profiter à d’autres prétendants. C’est notamment le cas de Jessica Pegula, qui n’a jamais caché son appétence pour la terre battue et dont les résultats parlent pour elle. Présente dans le dernier carré il y a 15 jours à Charleston et finaliste malheureuse ici-même l’an passé, la numéro 3 mondiale compte bien se faire une place et transformer le Big 3 du début de saison en Big 4.

Eminente membre de ce nouveau club de la gagne depuis janvier, Aryna Sabalenka sait que ses armes peuvent être redoutables dans la Caja Magica. Couronnée en 2021, la championne de l’Open d’Australie sort de quatre mois remarquables et s’est d’ores et déjà parfaitement adaptée à la terre battue, à l’image de son parcours jusqu’en finale à Stuttgart.

Prouver que cette surface lui sied sera la mission d’Elena Rybakina, qui n’a jamais fait mieux qu’un troisième tour ici, en deux participations. Quant à Caroline Garcia, Coco Gauff, Daria Kasatkina ou encore Paula Badosa, l’objectif affiché est bel et bien de retrouver une dynamique très positive à l’approche de Roland-Garros.

Même son de cloche du côté de Casper Ruud, Alexander Zverev et Félix Auger Aliassime chez les hommes. Un tableau dans lequel les prétendants déclarés à la victoire finale sont encore plus nombreux. La question de la fatigue se posera sans doute pour Holger Rune (finaliste à Monte-Carlo et vainqueur à Munich) et Andrey Rublev (titré sur le Rocher et finaliste à Banja Luka) mais là encore, leur qualité de jeu peut faire des ravages à Madrid. Historiquement mal à l’aise sur ocre, le nouveau 3e mondial Daniil Medvedev a une belle opération comptable à réaliser, lui qui n’avait pas pris part aux Masters 1000 sur cette surface l’an passé en raison d’une hernie.

Finaliste à Barcelone il y a quelques jours, Stefanos Tsitsipas veut pour sa part poursuivre sa montée en puissance. "Je me considère comme un candidat pour ce tournoi, a-t-il analysé face à la presse. Mon parcours à Barcelone m'a fait plaisir parce qu'après l'Open d'Australie, je n'ai pas été très loin dans les tournois. C’est un premier aperçu et je me sens à nouveau fort. Les choses se présentent sous les meilleurs auspices".