De la cour des grands aux juniors

Après le simple dames, Diane Parry a retrouvé le monde des juniors. Et elle n'est pas la seule.

Diane Parry Roland-Garros 2019©Pauline Ballet / FFT
 - Amandine Reymond

On parle souvent de la difficulté à passer du circuit junior au circuit professionnel mais l’inverse pourrait être vrai aussi. Et c’est une expérience que cinq jeunes joueuses sont en train de vivre lors de cette édition 2019.

Plus jeune joueuse (16 ans) à avoir passé un tour dans le tableau final du simple dames depuis dix ans, Diane Parry (8e mondiale juniors et tête de série n°2) semble bien gérer la transition et a parfaitement débuté son tournoi junior ce dimanche en s’imposant en deux manches (6/2, 6/2) et 1h09 de jeu contre une jeune Russe, 40e mondiale au classement ITF juniors, Daria Frayman.

Mais plus que le résultat, c’est la manière qui a impressionné les différents observateurs au bord du terrain. "Cette transition seniors-juniors est un exercice difficile car il y a beaucoup de différences entre les deux tableaux, explique son entraîneur, Gonzalo Lopez Sanchis. Aujourd’hui, Diane a affronté une fille qui joue très bien au tennis mais qui donne beaucoup moins de rythme que ses adversaires du tableau final.

À un moment, la balle venait vraiment moins vite et elle avait tellement de temps pour faire différentes choses qu’elle se trompait. Mais elle a su s’adapter et a très bien géré ce changement."

"Là où je l’ai trouvée très forte c’est qu’elle a réussi à pratiquer son jeu sans surjouer pour montrer qu’elle était forte, renchérit Thierry Champion, directeur du haut niveau à la FFT. Elle a parfaitement géré. Par séquences, son jeu était encore plus posé que lors de ses matchs en senior."

Passer d’inconnue à favorite

Des différences dans le rythme de jeu mais aussi dans le statut de ces jeunes joueurs, qui passent d’une situation où ils n’ont rien à perdre à une autre où, en tant que favoris, ils sont particulièrement attendus. 

"Dans le tableau des filles, il y a quatre favorites mais il y en a plusieurs autres, encore plus jeunes qui jouent très bien et qui sont très dangereuses car elles n’ont rien à perdre, confirme Gonzalo Lopez Sanchis. Mais même avec le statut de favorite, Diane reste calme. Elle sent que c’est différent mais elle s’adapte vite, elle est stable."

Difficulté supplémentaire à gérer, Diane Parry qui vise le titre chez les juniors, est encore en lice dans le tableau du double dames. Avec Fiona Ferro, elles ont éliminé les têtes de série n°13 samedi devant un court 1 plein à craquer et elles jouent pour une place en quarts de finale ce lundi.

"Ce n’est pas simple, concède son coach. Mais elle gère très bien les choses. Elle adore la compétition et n’a aucun mal à trouver de la motivation."



Comme elle, Elsa Jacquemot s’est frottée aux joueuses professionnelles et a même passé un tour en qualifications cette année.

Une expérience qui l’aide à aborder ce tournoi juniors dans lequel elle ambitionne elle aussi de s’imposer.

"J’avais déjà joué sur le court 14 pendant les qualifications du tableau senior donc j’étais contente d’y revenir pour le tableau juniors et ça s’est plutôt bien passé pour moi, commentait-elle à sa sortie du court après sa victoire contre la Slovène Pia Lovric (6/3, 6/0).

Je me suis sentie aussi bien que pendant les qualifications. Je n’avais qu’une envie, c’était de rentrer dedans, de ne pas penser à la pression et puis il y avait plein de monde, c’était génial. J’ai adoré."

Elsa Jacquemot Roland-Garros 2019©Cédric Lecocq / FFT

Devenir plus fort en gagnant en juniors

"Se servir de l’expérience des seniors pour réussir en juniors et vice-versa, ça doit être l’objectif de ces jeunes, commente Thierry Champion. Jouer les Grands Chelems juniors dans la peau de favorites, c’est important. Car si un jour, elles arrivent à être dans les meilleures mondiales, elles seront dans cette situation tout le temps." 

S’ils ne sont que 12 dans l’histoire de Roland-Garros à avoir fait le doublé juniors-seniors, d’autres ont su se servir de l’expérience pour réussir chez les pros. À l’image du vainqueur garçons en 2000, le Français Paul-Henri Mathieu.

"Il ne voulait pas jouer les juniors, se souvient Thierry Champion, son entraîneur de l’époque. Il voulait se concentrer sur les Futures et les Challengers. Quand Roland-Garros est arrivé, il a eu une wild-card pour les qualifications du simple messieurs (battu au premier tour) mais il ne voulait pas jouer les juniors. Il avait peur de perdre.

Il se disait : ‘Mais si je perds en juniors, qu’est-ce qu’il va se passer, qu’est-ce qu’on va dire de moi… je n’y arriverai pas sur le circuit professionnel...'

Je l’ai poussé à jouer quand même pour viser le titre mais aussi pour l’expérience en lui disant : ‘Si un jour tu veux bien jouer à Roland-Garros chez les pros, il faut que tu le fasses car tu joues sur les mêmes courts, devant le public français et il faut que tu te serves de cette expérience.’

Il a remporté le titre donc c’était la cerise sur le gâteau mais en plus, ça lui a servi pour la suite. Deux ans après, il a atteint les huitièmes de finale à Paris."

Paul-Henri Mathieu Tommy Robredo Roland-Garros juniors 2000©FFT

Comme, Paul-Henri Mathieu, Kristina Mladenovic avait elle aussi fait ses premiers pas dans la cour des grandes, l’année de son sacre chez les juniors en 2009.

Diane Parry, Elsa Jacquemot, Manon Léonard, Selena Janicevic et Loudmilla Bencheikh, les cinq Françaises qui ont goûté au Roland-Garros des "grandes", cette année s’inspireront-elles du parcours de leurs aîné(e)s ?