Après un Open d’Australie passionnant et des Masters 1000 américains qui ont sacré la jeunesse, il est enfin temps pour les protagonistes du circuit de glisser sur la terre battue. Très enthousiasmante, la période qui s’ouvre comporte évidemment son lot d’enjeux et d’interrogations et ne trouvera de réponses définitives que le week-end du 4 et 5 juin, sur le court Philippe-Chatrier.
ATP / WTA : six questions autour de la saison sur terre battue
Attendue avec impatience, la saison sur terre battue a officiellement démarré et les enjeux sont importants à un peu plus d'un mois de Roland-Garros 2022.
Iga Swiatek prolongera-t-elle son invincibilité ?
Si sa très bonne présaison, son jeu plus agressif et son nouvel état d’esprit lui ont permis de réaliser un parcours exceptionnel sur dur, Iga Swiatek reste une inconditionnelle de la terre battue. C’est bien évidemment sur cette surface qu’elle a conquis son plus beau titre, lors de l’édition 2020 de Roland-Garros. Avant son incroyable et inédit triplé en WTA 1000 à Doha, Indian Wells puis Miami cette année, c’est sur l’ocre de Rome qu’elle avait ouvert son compteur dans cette catégorie en 2021.
La numéro un mondiale a donc des points et une série de 17 matchs sans défaite à défendre. Au vu de ses récentes prestations – cocktail parfait entre succès écrasants et victoires au caractère – rien ni personne ne semble en mesure de l’empêcher de prolonger le plaisir. "C'est vraiment excitant, c'est toujours plus confortable pour moi de jouer sur la terre battue. Je suis tout simplement plus à l'aise sur cette surface, j'ai l'impression que je peux frapper des coups encore plus variés que sur le dur. Je ne me soucie pas des résultats que je vais obtenir. Je sais qu'il y aura beaucoup de pression et je ne peux pas promettre que je vais bien la gérer parce que je n'ai jamais été dans une telle situation auparavant. Je vais donc faire de mon mieux" a expliqué la nouvelle patronne à la WTA après son titre à Miami.
Absente à Charleston pour récupérer de son marathon doré, elle pourrait faire ses premières foulées sur terre battue à Stuttgart avant de disputer un nouveau tournoi WTA 1000 à Madrid.
Qui pour la stopper ?
Sous le feu des projecteurs, "1ga" sera donc la joueuse à battre sur ocre et les prétendantes sont nombreuses. Talentueuse et régulière peu importe la surface, Paula Badosa porte la terre battue dans son cœur et son quart de finale à Roland-Garros l’an passé a prouvé qu’elle avait largement les moyens de ses ambitions. Sur le podium du tennis mondial, l’Espagnole lorgne désormais sur le fauteuil de dauphine, actuellement occupé par Barbora Krejcikova. Blessée au coude et contrainte de déclarer forfait pour Indian Wells et Miami, la Tchèque prépare son retour et sera bien évidemment candidate à sa propre succession du côté de la Porte d’Auteuil.
Dans le dernier carré en 2021 (après sa victoire surprise sur Swiatek) et passée à un point d’accéder à la finale en lieu et place de la future vainqueur, Maria Sakkari souhaite franchir un cap en Grand Chelem mais également en WTA 1000, catégorie dans laquelle elle a disputé sa première finale à Indian Wells cette année. Briser le plafond de verre sera également l’objectif d’Aryna Sabalenka, longtemps dauphine d’Ashleigh Barty et désormais à la recherche de confiance et de régularité. Tenante du titre à Madrid, la Biélorusse n’aura pas le droit à l’erreur sur la route de Roland-Garros. Des succès d’ampleur sur terre, c’est également ce que viseront Simona Halep et son nouveau coach, Patrick Mouratoglou.
Alcaraz encore plus fort sur terre battue ?
En devenant le plus jeune joueur à remporter le Masters 1000 de Miami, le troisième de l’histoire dans cette catégorie (après Chang en 1990 et Nadal en 2005), Carlos Alcaraz a – encore – changé de dimension ce week-end. Battu uniquement par Matteo Berrettini à l’Open d’Australie et Rafael Nadal à Indian Wells cette saison, le protégé de Juan Carlos Ferrero a littéralement écrasé la concurrence en Floride, ne lâchant qu’un set face à Miomir Kecmanovic durant sa campagne. Les superlatifs viennent à manquer tant le prodige a émerveillé fans et observateurs par la variété de ses coups, sa qualité de déplacement et bien sûr, son sang-froid et son caractère dans les moments importants. Une palette plus que complète qui fait désormais de lui le successeur désigné du Big 3, alors qu’il n’a pas encore soufflé ses 19 bougies.
Un sentiment qui pourrait être amplifié sur terre battue, surface qui lui sied à merveille et sur laquelle il s’est révélé aux yeux du grand public la saison passée Porte d’Auteuil. De là à l’imaginer soulever un nouveau trophée en Masters 1000 ou même en Grand Chelem, il n’y a qu’un pas que son coach n’est pas prêt à franchir. "Quand il est à 100 %, il peut se donner encore davantage sur terre, mais laissons la porte ouverte à l'éventualité qu'il devienne encore meilleur sur dur, dans le futur […] Laissons-le avancer, laissons-le jouer. Je pense qu'il peut faire une grande saison, espérons-le aussi en Grand Chelem. Le voir prendre part à une fin de deuxième semaine, c’est peut-être la prochaine étape. Mais bien sûr, avant ça, il va falloir s'entraîner, rester focus, parce qu’il est très facile de perdre sa concentration maintenant" a confié Ferrero à l’issue de la finale victorieuse de son joueur. Prudence et protection sont de mise pour l’entourage du désormais 11e joueur mondial, qui devrait néanmoins être amené à prendre sa part du gâteau à Monte-Carlo, Madrid, Rome ou bien encore à Roland-Garros.
Nadal à 100% pour reprendre sa couronne ?
Ces deux dernières semaines, une star espagnole en a presque fait oublier une autre. Auteur d’un début de saison absolument exceptionnel durant lequel il a remporté l’ATP 250 de Melbourne, l’Open d’Australie et l’ATP 500 d’Acapulco, Rafael Nadal a vu sa série d’invincibilité de 20 matchs se stopper brusquement en finale à Indian Wells. La faute à un Taylor Fritz en plein rêve à domicile et à une gêne inattendue pour celui qui ne boudait pas son plaisir de pouvoir rejouer sans douleur ou presque depuis janvier. "C’est douloureux, j’avais du mal à respirer. Quand je bouge, c’est comme une aiguille qui s’enfonce. Ce n’est pas seulement la douleur, ça affecte également ma respiration" avait-il analysé après la rencontre.
Aussi surprenante soit-elle, cette défaite aurait pu être anecdotique seulement Rafa souffre d’une fissure à une côte, qui va l’éloigner des terrains durant plusieurs semaines. "Je suis touché et triste parce qu’après mon si bon début de saison, c’est une période très importante de l’année qui arrive, avec de bonnes sensations et de bons résultats passés. Mais, comme toujours, je garde cet esprit combattant. Je vais être patient et travailler dur après ma récupération" a-t-il publié sur ses réseaux sociaux. Autant dire que le Majorquin a rapidement fait une croix sur Monte-Carlo et Barcelone. S’il pourrait officiellement faire son retour à Madrid – même si les conditions ne sont pas idéales pour lui – ou à Rome (il est tenant du titre), sa préparation sera forcément tronquée. Une mauvaise nouvelle à l’heure où son plus grand rival s’apprête à réellement débuter son année.
Djokovic va-t-il enfin lancer sa saison ?
L’appétit est immense, l’attente va prendre fin. Absent en Australie et aux Etats-Unis, Novak Djokovic va enfin pouvoir lancer sa saison en enchaînant les tournois. Aligné à Dubaï, le Serbe n’a disputé que trois matchs cette saison, coupé dans son élan à la surprise générale par Jiri Vesely après avoir pris le meilleur sur Lorenzo Musetti et Karen Khachanov. Dans ces conditions, difficile de connaître le niveau réel du numéro un mondial, de retour sur son trône sans jouer grâce aux récents résultats insuffisants de Daniil Medvedev. Et si le Russe ne représente plus un danger dans l’immédiat puisqu’il sera indisponible entre un et deux mois suite à une opération chirurgicale pour traiter une hernie, le dernier vainqueur de Roland-Garros a des points à défendre et un Grand Chelem à aller chercher pour égaler le record de Rafael Nadal établi "chez lui" à Melbourne.
Les motivations ne manquent donc pas pour le "Djoker", qui multiplie les entraînements avec de prestigieux adversaires à Monte-Carlo. Au vu des images, il n’a évidemment rien perdu de son tennis pendant cette longue période sans compétition. Revanchard ou tout simplement heureux et soulagé de disputer des tournois, il devrait participer à tous les grands rendez-vous sur ocre, ainsi qu’au Serbia Open (ATP 250) organisé au Novak Tennis Center. Cette fois c’est sûr, il est de retour.
Des outsiders au niveau ?
Un ovni, le roi de la terre battue, le numéro un mondial et… les autres ! Demi-finaliste à l’Open d’Australie alors qu’il n’était pas certain d’y participer quelques jours avant le coup d’envoi du tournoi, Stefanos Tsitsipas attaque la partie la plus grisante de sa saison. Et le Grec n’aura pas le droit à l’erreur puisqu’il est tenant du titre à Monte-Carlo et finaliste sortant à Roland-Garros. Même cas de figure ou presque pour Alexander Zverev qui réalise un début de saison très moyen et qui va devoir défendre ses performances de l’an passé à Madrid (titre) et Roland-Garros (demi-finale).
Son bourreau à Miami Casper Ruud sera également à surveiller de près, lui qui a remporté cinq titres sur terre battue (!) en 2021 et qui avait été précocement stoppé dans un match de folie face à Alejandro Davidovich Fokina à Paris. De son côté, Matteo Berrettini espère toujours pouvoir participer au Grand Chelem parisien mais il a annoncé ce jeudi son forfait à Monte-Carlo, Madrid et Rome dans l'optique de se remettre de son opération de la main droite.