Finaliste presque surprise du dernier Open d’Australie, Garbiñe Muguruza a réjoui ses fans et les observateurs en général par son jeu mais aussi par son attitude sur et en dehors du terrain. S’il n’est pas question de lui parler de come-back, l’Espagnole de 26 ans a bel et bien retrouvé la lumière et ses sensations après avoir vécu l’une des périodes les plus délicates de sa carrière.
L’irrésistible renouveau de Garbiñe Muguruza
La gagnante de Roland-Garros 2016 a fait un retour fracassant sur le devant de la scène.
Chemin de croix
Au sortir de son dernier match sur la Rod Laver Arena, les émotions se bousculaient dans la tête de Garbiñe Muguruza. A chaud et au vu du scénario de la finale disputée face à Sofia Kenin, la déception prédominait. Après avoir remporté la première manche, elle a été submergée par l’engagement de la jeune américaine (4-6, 6-2, 6-2) payant peut-être également son importante dépense d’énergie durant toute la quinzaine. « Je ne suis pas vraiment satisfaite de ma performance. J'aurais dû mieux jouer a-t-elle lancé devant les journalistes. J'ai du mal à être heureuse. Pourtant, j'ai réalisé un superbe parcours ».
"This court brings an energy and the crowd is what makes it special."
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Une quinzaine australienne aussi belle qu’inattendue pour l’ancienne numéro 1 mondiale, éloignée des sommets depuis ses deux titres en Grand Chelem à Roland-Garros en 2016 et à Wimbledon l’été suivant. Certes, elle a de nouveau atteint le dernier carré Porte d’Auteuil en 2018 mais l’irrégularité de ses résultats n’était pas en adéquation avec ses ambitions. « Je pense que ce qui est le plus difficile c’est quand vous travaillez dur, autant et de la même façon qu’avant ou même plus et que vous ne voyez pas les résultats venir rapidement. C’est ce qu’il y a de compliqué pour nous. Les sportifs peuvent parfois devenir un peu désespérés, trop impatients. C’est très difficile d’être au top pendant des années, d’être régulier » a-t-elle confié avant sa demi-finale à Melbourne.
« Je n’ai pas disparu ! »
Un sentiment d’échec qui s’est fortement accentué en fin d’année dernière. Si elle n’a jamais quitté le paysage tennistique mondial, les sept défaites lors de ses huit derniers matchs de la saison ont enfoncé le clou. Eliminée au premier tour à Wimbledon, à l’US Open mais également lors de la tournée asiatique, elle est retombée au 36ème rang mondial, sa position la plus basse depuis 2014.
De quoi égratigner sa confiance et sa relation vis-à-vis des médias et des spécialistes. « Je suis restée sur le circuit pendant tout ce temps, j'ai joué beaucoup de tournois. Je n'ai pas disparu ! J'étais bien là, c'est juste que je n'arrivais pas à me hisser jusqu'en finale. Les médias ont été durs envers moi pendant cette période. Aujourd'hui, les discours sont élogieux, mais si je perds la semaine prochaine ce ne sera pas la même chose » a-t-elle avoué la semaine passée.
Ascension émotionnelle
Puisque cet acharnement et ce travail n’ont pas porté leurs fruits, Garbiñe Muguruza a décidé de bouleverser ses habitudes et de remettre en question son mode de fonctionnement sur les plans personnel et professionnel. Pour arriver à ses fins, elle s’est notamment lancée dans une expérience un peu folle : l’ascension du Kilimandjaro pendant l’intersaison. « C’est une expérience qui a changé ma vie. Je ne peux pas vous dire en quoi exactement a expliqué l’Espagnole pendant l’Open d’Australie. Mais ça a vraiment eu un impact sur moi, pas seulement en tant que joueuse mais en tant que personne en général. Relever ce défi a provoqué beaucoup de choses en moi ».
Si l’explication peut paraître quelque peu mystique, la native de Caracas est vraiment revenue transformée de ce voyage. Plus posée sur et en dehors des courts, les résultats parlent d’eux-mêmes pour la désormais 16ème mondiale au classement WTA : en trois tournois en 2020, elle a remporté 11 rencontres, soit d’ores et déjà la moitié de son total de victoires en 2019 ! « J'ai senti que mon jeu était bien meilleur qu'avant. Il me faut désormais travailler physiquement, car ces tournois sont très éprouvants ».
Conchita Martinez, architecte de la reconstruction
Si ce travail sur elle-même était indispensable, le renouveau de la championne a également un nom : Conchita Martinez. Déjà présente dans l’entourage de la joueuse lorsqu’elle a glané son titre à Wimbledon en 2017, la coach est bien de retour et semble de nouveau avoir trouvé la bonne formule pour tirer le meilleur de Muguruza. « C’est un plaisir d’être de retour et unies à nouveau pour travailler dur. C’est formidable pour moi de la voir réussir […] Elle est très agressive comme elle l'était quand elle jouait son meilleur tennis. Physiquement, je la trouve très bien. Elle prend la balle très tôt. Elle prend l’initiative, elle accélère et elle termine souvent au filet » a-t-elle déclaré devant la presse à Melbourne.
Mais la transformation ne concerne bien sûr pas que le jeu de sa protégée. Il s’agit d’un changement beaucoup plus global. « J’essaie de l’aider autant que je peux sur chaque aspect de son jeu. Ce n’est pas uniquement du coaching, c’est aussi mon expérience de joueuse, la partie mentale. J’essaie de l’aider, on échange beaucoup et on se comprend. On n’est pas obligé de se parler pendant trois heures, je peux aller droit au but. Elle comprend et elle est en confiance maintenant » a-t-elle conclu concernant cette association.
🤜🏽🎾🤛🏽
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Un sentiment très largement confirmé par de nombreux observateurs à l’occasion du premier Grand Chelem de la saison. C’est notamment le cas de Martina Navratilova, qui a longuement donné son avis sur le duo dans une chronique sur le site de la WTA. « Trop souvent ces dernières années, Garbiñe donnait l’impression de jouer la peur au ventre, elle avait l’air malheureuse, craintive, comme si elle ne pensait qu’à la défaite. Evidemment, quand vous pensez comme ça, ça finit par arriver : vous perdez. Mais elle a retrouvé sa mentalité de championne […] Elles ont travaillé sur différents aspects du jeu mais surtout, Martinez lui a apporté cette mentalité de championne »
Rendez-vous en terrain connu
Evidemment, marquer les esprits lors de cet Open d’Australie n’est pas une fin en soi pour Garbiñe Muguruza. Ses probantes victoires contre Elina Svitolina, Kiki Bertens ou encore Simona Halep en appellent d’autres. Et pas question d’attendre les prochaines levées du Grand Chelem pour briller et battre des joueuses mieux classées. Finaliste en Australie alors qu’elle n’était pas tête de série et qu’elle n’était jamais allée au-delà des quarts de finale, elle a prouvé son aisance sur toutes les surfaces au fil des saisons. Reste donc à retrouver la fameuse régularité qu’elle cherchait désespérément l’an passé.
De retour dans le TOP 20 mondial, elle ambitionne désormais de poursuivre son ascension au classement à Indian Wells, Miami ou encore Madrid. De bonnes performances dans ces tournois lui faciliteraient la tâche pour remettre les mains sur le titre dans son jardin parisien. Mais qu’importe le tableau, pourvu qu’elle ait l’ivresse. Libérée de ses démons et de nouveau en pleine confiance, elle ne se fera pas prier pour bousculer l’ordre établi. Le rendez-vous est pris.
Thanks #AusOpen and all🇦🇺 fans 😘
— Garbiñe Muguruza (@GarbiMuguruza) February 1, 2020
...and to my team 💪💪!!
Congrats @SofiaKenin 🏆
See you all next year! pic.twitter.com/AXz36tHQpI