Rétro WTA 2022 : Barty et Serena parties, Swiatek danse

Retour sur une saison 2022 riche en émotions et en enseignements sur le circuit WTA.

Iga Swiatek, Daria Abramowicz, Tomasz Wiktorowski, entourage, Roland Garros 2022, trophy©Corinne Dubreuil / FFT
 - Romain Vinot

Qui dit fin d’année dit prise de recul et bilan de l’exercice écoulé ! Et force est de constater que les protagonistes du circuit féminin ont livré une partition très enthousiasmante tout au long de la saison. De la retraite surprise d’Ashleigh Barty jusqu’à l’envol de Caro Garcia en passant évidemment par la domination incontestable de la nouvelle reine Iga, découvrez notre récap’ d’un cru WTA 2022 particulièrement marquant.

Barty met fin à la party

Après une saison 2021 loin d’être avare en surprises – à l’image du sacre d’Emma Raducanu à l’US Open – tous les regards se sont rapidement tournés avec curiosité vers l’Australie où Ash Barty faisait office de grandissime favorite. Sept rencontres plus tard sans perdre le moindre set, la numéro un mondiale remportait un troisième titre du Grand Chelem (après Roland-Garros 2019 et Wimbledon 2021), succédant ainsi à Christine O’Neil, dernière championne australienne à Melbourne en 1978. Prophétesse en son pays et sur le toit du monde depuis septembre 2019, personne ne pouvait alors imaginer que cette période de domination allait s’arrêter. Personne, sauf la principale intéressée.

Ashleigh Barty / Open d'Australie 2022©Corinne Dubreuil / FFT

Dans une vidéo publiée sur les réseaux sociaux le 23 mars, la native d’Ipswich a en effet annoncé mettre un terme à sa carrière. "Pouvoir gagner Wimbledon était mon rêve, mon seul vrai rêve dans le tennis. Cela a vraiment changé ma perspective. J'ai eu cette intuition après Wimbledon et j'en ai beaucoup parlé à mon équipe. Il y avait juste une petite partie de moi qui n'était pas tout à fait satisfaite […] Et puis est venu le défi de l'Open d'Australie et je pense que pour moi, c'est la manière la plus parfaite de conclure" a-t-elle confié émue à son amie Casey Dellacqua.

La championne de 25 ans a ainsi clôturé sa magnifique aventure sur un quinzième et dernier trophée en simple. "Le succès pour moi c'est de savoir que j'ai tout donné, tout ce que je pouvais. Je suis comblée, je suis heureuse, et je sais combien de travail il faut pour donner le meilleur de soi-même" a-t-elle conclu. Une retraite surprise qui laissait alors le circuit sans patronne, pensait-on. Mais c’était sans compter sur l’avènement d’une nouvelle reine incontestable et incontestée, Iga Swiatek.

1ga, une saison proche de la perfection

Demi-finaliste de l’Open d’Australie, titrée à Doha puis Indian Wells, Iga Swiatek apparaissait déjà en mars comme la rivale la plus sérieuse d’Ash Barty. Et si la retraite de cette dernière lui a offert le trône sur un plateau, encore fallait-il confirmer les espoirs et légitimer cette place de numéro un mondiale.

Et 1ga l’a fait de manière exceptionnelle grâce notamment à un changement de mentalité, confirmé dans le désert californien : "Mentalement, je sens que je suis désormais capable de rester calme et de trouver des solutions. Avant, je me battais avec mes émotions et je ne faisais pas les bons choix […] Quand je perdais, j’avais l’impression que ma vie était ratée, que toute mon existence était remise en cause. Maintenant, je mets plus de distance et les choses sont plus claires. Je suis plus calme et j’ai davantage de confiance, c’est la clé".

Iga Swiatek / Indian Wells 2022©Antoine Couvercelle / FFT

Une clé qui lui a ouvert les portes de la perfection, comme le prouvent ses incroyables faits d’armes et ses statistiques hallucinantes. En onze mois, la Polonaise a totalisé 68 victoires pour seulement 9 défaites. Des succès parfois à l’arraché et au mental mais bien souvent étincelants et ponctués de 22 "bagels", un record depuis les 25 de Serena Williams en 2013. Sacrée à huit reprises cette saison, "1ga" s’est adjugé sans trembler son deuxième Roland-Garros après avoir réussi le fameux Sunshine Double à Indian Wells et Miami.

Invincible durant 37 matchs consécutifs, elle a aisément digéré son élimination au troisième tour de Wimbledon contre Alizé Cornet pour soulever un troisième Majeur à l’US Open, son premier loin de la terre battue parisienne. Une saison historique – qui lui a légitimement valu le titre honorifique de joueuse de l’année décerné par la WTA – et une avance de plus de 6000 points sur sa dauphine Ons Jabeur au classement, qu’elle tentera de magnifier dès janvier à l’Open d’Australie.

Jabeur se rapproche du bonheur, Caro vole toujours plus haut

Si Iga Swiatek a monopolisé une grande partie des projecteurs, d’autres joueuses ont également été mises en lumière durant cette belle saison 2022. C’est évidemment le cas de Ons Jabeur. Première joueuse du monde arabe à remporter un tournoi WTA 1000 (à Madrid), elle a fait preuve d’une incroyable force de caractère pour se remettre de son élimination au premier tour de Roland-Garros. Au sommet de son art sur herbe, celle dont la joie de vivre irradie sur tout le circuit a touché son rêve du bout des doigts en finale de Wimbledon.

Battue à la surprise générale par Elena Rybakina, la "Ministre du Bonheur" était évidemment déçue mais également convaincue que d’autres opportunités se présenteraient. "Je suis fière de mon résultat. Je crois en moi, je sais que je vais revenir et gagner un Grand Chelem. Je veux rester positive. Je pense que c’est le début de belles choses pour moi" avait-elle confié en conférence de presse au All England Club.

Ons Jabeur / Wimbledon 2022©Corinne Dubreuil / FFT

Son mental et son immense talent lui ont permis d’atteindre dans la foulée la finale de l’US Open et de récupérer la deuxième place mondiale. Un dernier plafond de verre qu’elle compte franchir dans les saisons à venir, portée par l’espoir de tout un peuple. "Je veux absolument gagner un Grand Chelem pour prouver que ce n’est pas impossible pour quelqu'un de mon pays, de mon continent. Je n'ai pas l'intention d'abandonner. Je vais garder espoir" a-t-elle clamé à New York.

En demi-finale du Grand Chelem new yorkais, la Tunisienne était parvenue à battre la joueuse en forme de cette fin de saison, Caroline Garcia. Un retour au premier plan mérité pour la Lyonnaise, victime de plusieurs blessures et coups de moins bien ces dernières années. Championne en double à Roland-Garros en compagnie de Kristina Mladenovic, elle a définitivement pris son envol en simple à la suite du Grand Chelem parisien en remportant 31 victoires (hors qualifications) et trois titres sur trois surfaces différentes à Bad Hombourg, Varsovie et Cincinnati avant de poser ses valises à New York.

Sur la lancée de son incroyable aventure dans l’Ohio où elle est devenue la première joueuse issue des qualifications à remporter un WTA 1000, elle a atteint les demi-finales d’un Majeur pour la première fois de sa carrière grâce à une implication totale et une domination sans partage (aucun set perdu et trois breaks concédés lors de ses cinq premières rencontres).

Une élimination aux portes de la finale qui n’a pas altéré sa motivation, bien au contraire. 79e joueuse mondiale fin mai, son incroyable parcours lui a permis de réintégrer le Top 10 et de disputer son deuxième Masters après celui de 2017. Une opportunité qu’elle a de nouveau transformé en semaine de rêve pour devenir la deuxième joueuse française à inscrire son nom au palmarès des WTA Finals après Amélie Mauresmo en 2005.

"C’est vraiment indescriptible et ça a été une super saison pour moi, j’ai vécu de grands moments, a-t-elle expliqué à l’issue de son sacre. Des victoires en 250 jusqu’au Masters 1000 de Cincinnati. Une première demi-finale en Grand Chelem et cette victoire ici… Ce sont beaucoup d’années d’efforts, difficiles, et je suis vraiment super contente et très fière de tout le travail accompli cette année". Une consécration qui en appelle d’autres pour la désormais n°4 mondiale…

Caroline Garcia / WTA Finals 2022©Mike Frey / FFT

Serena, un dernier show grandiose

Début août, l’annonce a fait l’effet d’une bombe. Dans une chronique du magazine Vogue rédigée à la première personne, Serena Williams a confirmé sa volonté de mettre un terme à sa carrière. "Je n’ai jamais aimé le mot 'retraite'. Ce n’est pas un mot moderne pour moi. Peut-être que le meilleur mot pour décrire ce que je m’apprête à vivre est 'évolution'. Je suis ici pour vous dire que j’évolue, je m’éloigne du tennis pour aller vers d’autres choses importantes pour moi" a-t-elle sobrement rédigé. Mais après 27 ans de carrière, 23 titres du Grand Chelem en simple, 73 sacres sur le circuit et 319 semaines passées à la tête du classement WTA, SW23 ne pouvait pas se contenter de quelques mots pour tirer sa révérence.

Et la reine a eu le droit à des adieux grandioses, chez elle, à l’US Open. Tout était d’ailleurs prévu dès son premier tour face à Danka Kovinic programmé en session de soirée : tenue de gala, accueil de rock-star, tifo à sa gloire dans des tribunes bondées, louanges de Billie Jean King en fin de rencontre et ovation de nombreuses stars présentes pour l’occasion. Mais malgré l’émotion et le poids de l’événement, elle est parvenue à rallier le troisième tour – en s’offrant au passage le scalp de la n°2 mondiale Anett Kontaveit – grâce à cette rage et cette puissance qui ont fait sa légende. Un dénouement magnifique pour une joueuse hors norme qui en a inspiré tant d’autres au cours de sa formidable carrière.

Serena Williams / US Open 2022©Corinne Dubreuil / FFT

A commencer bien sûr par ses compatriotes Coco Gauff et Jessica Pegula, qui ont toutes les deux franchi un important palier cette année. Ensemble, elles ont disputé la finale en double à Roland-Garros ainsi que le Masters et sont désormais confortablement installées dans le Top 10. En simple, Coco Gauff a également atteint la finale de Roland-Garros et les quarts à l’US Open pendant que son ainée a disputé trois quarts de finale en Majeur avant de remporter le WTA 1000 de Guadalajara pour atteindre la 3e place mondiale. Malgré le départ de Serena, le tennis féminin américain semble donc avoir de beaux jours devant lui.