Coéquipiers en Coupe Davis juniors lorsqu’ils avaient offert la victoire au Canada face à l’Allemagne en 2015 puis en Coupe Davis, Denis Shapovalov et Felix Auger-Aliassime, parfois adversaires comme lors du troisième tour de l’Open d’Australie en début d’année, écrivent ensemble une nouvelle page du tennis canadien à Wimbledon. Pour la première fois, le Canada place ainsi deux joueurs en quarts de finale d’un tournoi du Grand Chelem.
Auger-Aliassime et Shapovalov reverdissent
Tous deux qualifiés pour leur premier quart de finale à Wimbledon, Felix Auger-Aliassime et Denis Shapovalov ont passé un cap sur le gazon londonien.
C’est aussi une première tout court pour Felix Auger-Aliassime. Battu en cinq sets en huitième de finale de l’Open d’Australie par Aslan Karatsev, le 19e mondial avait ensuite connu une période de moins bien et traversé sans briller la saison sur terre battue, avec un quart à Barcelone, un huitième de finale à Rome et deux défaites au premier tour à Lyon et Roland-Garros. Mais le protégé de Frédéric Fontang a retrouvé le sourire et les sensations dès qu’il a posé les pieds sur gazon.
Même s’il a perdu sa huitième finale (sur huit disputées) sur le circuit face à Marin Cilic à Stuttgart, il a ensuite atteint les demi-finales à Halle (battu par Ugo Humbert) avant d’enchaîner les succès à Londres. En huitièmes, il a confirmé cette dynamique en battant Alexander Zverev en cinq sets alors qu’il ne lui avait jamais pris un set lors de leurs trois précédentes confrontations.
Une victoire référence
"Je pense que ma célébration était vraiment spontanée et honnête. C’est une étape importante pour ma carrière, a commenté le protégé de Frédéric Fontang après sa qualification pour son premier quart de finale en Grand Chelem. La "plus belle victoire de (sa) carrière" selon ses propres termes. On veut toujours bien jouer dans les Grands Chelems. Et puis le scénario du match, avec tant de hauts et de bas, breaké dans les deux premiers sets, j’ai réussi à revenir pour les gagner tous les deux. J’ai perdu les deux suivants, et j’ai eu du mal à finir dans le cinquième. Il y avait tout dans ce match. J’ai dû puiser loin physiquement et mentalement et ça rend les choses encore plus agréables."
Prochain match entre amis
En quarts, le Canadien qui fêtera ses 21 ans début août, affrontera l’Italien Matteo Berrettini dont il est très proche. "Nos copines sont cousines donc on passe beaucoup de temps ensemble, a-t-il confié. C’est l’un de mes meilleurs amis sur le circuit. C’est vraiment quelqu’un de génial, on s’entend super bien. Comme on est dans la bulle, on dîne parfois ensemble, on regarde les matchs ensemble. On est vraiment amis. C’est sympa de se jouer. On est capables de faire la différence entre ce qui se passe sur le court et en dehors. On a tous les deux fait un bon tournoi jusqu’à maintenant et on va tout donner sur le court. Je pense que ça sera un match sympa."
Soutenu par tout un pays, "FAA" ne sera pas seul sur les courts mercredi à Londres. "On se bat pour soi évidemment, pour son équipe. Mais on a aussi tous ceux qui sont derrière nous à la maison dans un coin de notre tête. La tonne de message que j’ai reçu après de la part des gens qui m’ont aidé à être là où j’en suis aujourd’hui, ça représente beaucoup pour moi. Leur rendre ça d’une certaine façon est génial pour moi. C’est très agréable. C’est un travail d’équipe. Le pays est derrière nous. Ma ville est derrière moi. C’est top d’avoir autant de soutien. C’est une super journée pour nous les Canadiens et j’espère que ça va continuer", a-t-il ajouté en référence à sa présence et celle de Denis Shapovalov en quarts.
Shapovalov veut faire ses preuves
Ce dernier, quart de finaliste à Stuttgart et demi-finaliste au Queen’s après avoir dû déclarer forfait à Roland-Garros a lui aussi retrouvé son tennis sur le gazon. Vainqueur de Wimbledon juniors en 2016, il n’avait depuis jamais dépassé le deuxième tour sur les courts du All England Tennis Club mais il semble avoir trouvé la recette pour briller sur herbe. "J’ai toujours aimé joué sur gazon mais le circuit juniors et le circuit pro sont deux mondes différents, il m’a fallu un peu de temps pour m’adapter."
Parfois critiqué pour son manque de résultats au plus haut-niveau ou sous-estimé, le Canadien puise sa force dans l'adversité. "Je pense que prouver aux gens qu’ils ont eu tort est ce qui a fait de moi la personne que je suis aujourd’hui. J’ai grandi sans l’aide d’une fondation, tout seul avec mes parents qui ont littéralement dépensé chaque dollar qu’ils gagnaient dans ma carrière. Toujours devoir faire mes preuves, ne jamais être assez bon, ne pas être pris dans certaines équipes, lieux… C’est un thème récurrent dans ma vie. C’est comme ça que je trouve l’inspiration et la motivation. Je ne suis pas rancunier mais ça me motive sur le court."
Impressionnant contre Andy Murray et Roberto Bautista Agut, tous deux battus en trois sets, le 12e mondial qui affrontera Karen Khachanov pour une place en demi-finale, ne compte pas s’arrêter là. "Je suis très content de mon jeu. Roberto est un joueur très difficile à affronter. Le battre en trois sets dans un tournoi comme celui-ci confirme la bonne forme affichée contre Andy Murray. Je suis content de m’améliorer à chaque match, je me suis vraiment beaucoup amusé sur le court. J’ai l’impression que tout fonctionne pour moi. Cela ne veut évidemment pas dire que ça va continuer comme ça mais je suis vraiment satisfait de la façon dont j’ai joué lors de mes deux derniers matchs."
Des opportunités à saisir
Avec, six joueurs inexpérimentés à ce stade de la compétition encore en lice, les portes pourraient s’ouvrir pour certains…
Felix Auger-Aliassime en a bien conscience… "Je pense que les joueurs qui se sentent bien sur cette surface peuvent frapper un grand coup. Il y a les grands champions comme Novak (Djokovic) et Roger (Federer), les plus expérimentés et les favoris pour le titre. Ils vont être durs à battre car ils ont gagné de nombreuses fois ici. Mais avec l’absence de Rafa (Nadal) et Domi (Thiem), ça peut ouvrir un peu le tableau. En tant que joueur du circuit, on essaie de profiter de chaque opportunité. On n’y arrive pas toujours mais on se bat pour ça. C’est sympa de voir de nouveaux visages en quarts de finale. Moi en tout cas je suis content d’en faire partie."