Les échéances se suivent mais ne se ressemblent pas sur les circuits ATP et WTA. Après les sacres attendus des superstars Swiatek et Sinner le week-end dernier, Jasmine Paolini, Jordan Thompson, Sebastian Baez ou encore Karen Khachanov ont été couronnés à l’issue de tournois aussi ébouriffants qu’enthousiasmants.
WTA / ATP : Paolini et Thompson, l’abnégation récompensée
Respectivement titrés à Dubaï et à Los Cabos, l’Italienne et l’Australien ont déjoué les pronostics en conclusion d’une semaine marquée par de nombreuses premières.
Paolini fait encore briller l’Italie
Dans un événement WTA 1000 où concourraient les quatre meilleures joueuses du monde, l’affiche de la finale entre Anna Kalinskaya et Jasmine Paolini avait de quoi surprendre. Etonnant sur le papier, ce remake du huitième de finale de l’Open d’Australie a toutefois tenu toutes ses promesses. Issue des qualifications et tombeuse consécutivement de Jelena Ostapenko, Coco Gauff et Iga Swiatek, la moins bien classée des deux joueuses a pris le meilleur départ en s’adjugeant la première manche puis en breakant rapidement dans le deuxième set.
Mal embarquée comme lors de son entrée en lice face à Beatriz Haddad Maia (elle était menée 4/6, 2-4, 15-40), la virevoltante italienne a fait parler son puissant coup droit pour recoller puis égaliser en prenant le service adverse en toute fin de deuxième manche. Des ressources psychologiques et un sang-froid qui lui ont de nouveau permis d’inverser la tendance dans le set décisif alors que son opposante a mené 5-3 avant de servir pour le gain du match à 5-4. En remportant les quatre derniers jeux de la rencontre, Paolini a définitivement fait basculer une finale plaisante et indécise pour s’offrir le deuxième titre de sa carrière (4/6, 7/5, 7/5 en 2h13).
Déjà couronnée au WTA 250 de Portoroz en 2021 (où elle avait d’ailleurs battu Kalinskaya en huitièmes de finale), la joueuse de 28 ans repart donc de Dubaï auréolée d’un tout nouveau statut et avec un prestigieux trophée dans ses bagages. Classée 64e en février 2023, elle pointe ce lundi à un inédit 14e rang mondial. Une ascension quelque peu tardive, qu’elle assume pleinement.
"Chaque personne a ses propres étapes, sa propre histoire, a-t-elle analysé en conférence de presse. J’ai eu besoin de plus de temps pour croire que je pouvais jouer à ce niveau, comme je l’ai fait cette semaine. Je sais que ce ne sera pas comme ça à tous les tournois mais je profite de mon tennis et de mes matchs. J’aime ce que je fais, j’essaie de vivre l’instant présent et de faire de mon mieux […] Je me concentre sur ma progression et l’amélioration de mon jeu parce que je pense que c’est la clé. Je dois faire tout ce que je peux sans me fixer trop d’objectifs parce que ce n’est pas bon pour moi. Mon coach m’a dit qu’il fallait que je gagne un titre cette année mais je ne pensais pas le faire si tôt et dans un tournoi aussi important !"
Troisième joueuse transalpine de l’histoire à inscrire son nom au palmarès d’un WTA 1000 – après Flavia Pennetta (à Indian Wells en 2014) et Camila Giorgi (à Montréal en 2021) – la native de Castelnuovo di Garfagnana s’inspire de ses illustres compatriotes et progresse au contact de Sara Errani. "C’est incroyable de l’avoir à mes côtés, je progresse à l’entraînement et elle me donne aussi des conseils sur le terrain, a-t-elle confié au podcast WTA Insider. Elle est plus expérimentée que moi et a joué à un niveau incroyable. Elle sait comment fonctionne le tennis et elle est très intelligente."
Emmené par un Jannik Sinner qui côtoie les sommets, le tennis italien se porte à merveille et Jasmine Paolini s’en réjouit. "Au début, on nous comparaît à l’ancienne génération mais maintenant, les regards sont davantage tournés vers le tennis masculin, ce qui est une bonne chose parce que ça nous décharge d’une mauvaise pression (rires). Ce qu’ils font est extraordinaire, ça nous pousse et c’est très bien pour notre pays" a-t-elle expliqué à l’issue de sa victoire face à Maria Sakkari en huitièmes de finale.
Nul doute qu’avec ce sacre et cette progression, les projecteurs seront davantage braqués sur elle à l’avenir.
Thompson, le doublé marathon
Autre exemple de patience, de travail et d’abnégation, Jordan Thompson a quant à lui soulevé le premier trophée de sa carrière professionnelle sur les courts de Los Cabos. Miraculé en quarts (il était mené 0/6, 1-4, 15-40 et a sauvé trois balles de match face au jeune Alex Michelsen), l’Australien s’est ouvert les portes de la finale de cet ATP 250 en remportant un thriller de 3h40 contre Alexander Zverev. Lucide malgré la fatigue accumulée (12h05 de jeu en cinq matchs), le joueur de 29 ans a livré une dernière copie très propre pour prendre le meilleur sur Casper Ruud (6/3, 7/6(4) en 2h02).
Auteur de seulement huit fautes directes, il a sauvé 11 des 13 balles de break obtenues par le Norvégien et a remporté 18 points sur 22 possibles au filet pour conclure en beauté une semaine dont il se rappellera longtemps. "J’ai passé tellement d’heures sur le terrain ! En quarts, j’aurais pu perdre 6/0, 6/0 et maintenant je soulève le trophée… C’est un miracle !" s’est-il enthousiasmé après sa victoire.
Et puisqu’un bonheur ne vient jamais seul, il s’est également adjugé le double en compagnie de son compatriote Max Purcell ! Ou comment parfaitement rentabiliser 17h25 passées sur les courts…
Baez en costume de champion à Rio
A l’instar de Jasmine Paolini, Sebastian Baez a lui aussi remporté son plus beau titre sur la terre battue de Rio. Et pour soulever son premier ATP 500, l’Argentin a mis fin au conte de fées de son compatriote Mariano Navone (6/2, 6/1 en 1h22). Qualifié et vainqueur de Cameron Norrie dans le dernier carré, celui qui n’avait jamais gagné le moindre match sur le circuit principal n’a rien pu faire face à son ainé, écœurant de puissance et de réussite en retour (58% de points gagnés sur la première adverse et six balles de break converties sur 14). "C’est incroyable ! Je me suis senti très bien ici, comme chez moi-même, grâce au public, s’est réjoui le champion. Pendant la présaison, j’ai passé une semaine à Rio donc je connais bien cet endroit et les gens. J’ai vraiment apprécié le temps passé sur le terrain et en dehors."
Une édition 2024 très réussie au cours de laquelle les spectateurs ont notamment pu bruyamment encourager une jeunesse toujours aussi décomplexée. Outre le spectaculaire et inattendu parcours du finaliste, le Brésilien Joao Fonseca a fait une entrée fracassante dans la cour des grands. A seulement 17 ans, il est devenu le premier joueur né en 2006 à remporter un match sur le circuit ATP. Une première victoire face à Arthur Fils sublimée par un deuxième succès contre Cristian Garin. De quoi gagner 322 places au classement, le vainqueur de l’US Open juniors pointant désormais au 343e rang mondial !
Khachanov stoppe Mensik
Karen Khachanov était prévenu : pour gagner son sixième titre, il fallait mettre fin à l’incroyable aventure du prodige Jakub Mensik. A seulement 18 ans, le Tchèque a rallié la dernière marche en battant notamment Andy Murray, Gaël Monfils et Andrey Rublev, devenant au passage le plus jeune joueur à disputer la finale de l’ATP 250 de Doha et à battre un membre du top 5 depuis Carlos Alcaraz contre Stefanos Tsitsipas à l’US Open 2021. Conscient du danger, "KK" s’est montré très sérieux sur son engagement (83% de points gagnés, aucune balle de break concédée) pour pousser son vis-à-vis au tie-break dans le premier set.
Un jeu décisif remporté 14-12 non sans sauver quatre balles de set ! Un score porte-bonheur pour le désormais 15e mondial, également vainqueur d’un tie-break 14-12 en demi-finale contre Alexei Popyrin... "Je n’arrive pas à croire que ce soit le même score, le même jeu décisif… s’est étonné le champion. Je suis resté fort et je suis extrêmement heureux d’avoir remporté ce premier set. Ca m’a beaucoup aidé et ça m’a donné beaucoup de confiance pour la deuxième manche." Lancé sur la voie du succès, il est en effet parvenu à trouver la faille malgré l’incroyable réussite adverse au service tout au long de la semaine (16 aces en finale). "J’ai cru que je jouais contre John Isner et non contre Jakub Mensik, a-t-il plaisanté durant la cérémonie de remise des trophées. Chaque titre est spécial pour moi, on joue toutes les semaines et on veut toujours gagner."
De son côté, bien qu’il n’ait pas réussi à terminer en beauté, le finaliste avait de quoi être fier de son aventure qatarie, qui le propulse dans le Top 100. "Je n’oublierai jamais cette semaine, a-t-il lancé. En raison de mon classement initial, je ne pouvais pas participer à ce tournoi alors j’ai décidé d’utiliser la place octroyée par mon aventure Next Gen. J’ai essayé de profiter de chaque instant sur le court mais je ne m’attendais pas à atteindre la finale. Je suis à la fois triste et heureux car la défaite a été rude aujourd’hui mais c’était un grand match."
Au vu du niveau de jeu développé et de sa marge de progression, Jakub Mensik devrait vivre de nouvelles très belles émotions dans les mois à venir.