Vainqueur de Casper Ruud en finale de l'édition 2023 de Roland-Garros (7/6(1), 6/3, 7/5 en 3h13), Novak Djokovic a écrit une nouvelle page de l'histoire de son sport. Il est désormais le seul et unique joueur masculin à compter 23 titres du Grand Chelem à son palmarès. Ce lundi, il sera également de nouveau numéro un mondial.
Djokovic au firmament
Troisième Roland-Garros et 23e titre du Grand Chelem pour le Serbe, qui devient le joueur masculin le plus titré de tous les temps.
Devant Nadal, sur les terres de Nadal
Voilà probablement vingt ans qu'il attendait ça, depuis qu'il est passé professionnel en 2003. Ce dimanche 11 juin 2023, il y est. Novak Djokovic est officiellement au firmament de sa discipline, en tout cas seul au sommet du classement des joueurs les plus titrés de l'histoire en Grand Chelem. Un honneur qu'il partageait jusqu'ici avec Rafael Nadal depuis son 22e Majeur conquis en début de saison à l'Open d'Australie.
Ironie du sort, c'est sur les terres sacrées du maître des lieux - forfait cette année en raison d'une blessure persistante au muscle ilio-psoas - qu'il a décroché le fameux 23e, en étouffant à petit feu un Casper Ruud pourtant rentré beaucoup plus crânement dans sa finale qu'il ne l'avait fait l'an dernier. Mais le Norvégien a fini par perdre un premier set titanesque qu'il aurait peut-être mérité de gagner. Avant d'être emporté par le souffle de l'Histoire, qui appartient désormais totalement à la légende serbe.
Pendant un moment donc – disons jusqu'au tie-break, mais nous y reviendrons -, c'est plutôt Djokovic qui sembla un peu écrasé par le poids de l'enjeu. Breaké d'entrée sur un horrible "Djokosmash", auteur de 15 fautes directes sur les cinq premiers jeux, il n'était alors que l'ombre du prédateur qui avait terrassé Carlos Alcaraz en demi-finales. Mais il trouva le moyen de rester en vie, avec la complicité involontaire de Ruud, qui lui rendit la politesse en perdant son service à 4-2, commettant, à son tour, une grosse faute sur un smash expédié dans le filet.
Le "perfect" incroyable de Djokovic sur les jeux décisifs
Le Norvégien, on l'a dit, avait pourtant beaucoup mieux débuté sa troisième finale du Grand Chelem que sa toute première, ici-même, l'an dernier, contre Rafael Nadal. Utilisant à merveille son coup droit et distillant, côté de revers, de nombreux slices courts et sans consistance pour priver son adversaire de rythme et l'empêcher à tout prix de jouer à hauteur de hanche, il était à l'aise dans son match. Aussi bien tactiquement que physiquement et mentalement. Il passa d'ailleurs tout près de prendre l'avantage en s'approchant à deux points de la première manche, à 5-4, 0-30, après avoir réalisé le point du match sur un enchaînement tweener/contre-amortie qui fit lever d'extase le Chatrier.
Mais cela ne fit pas bouger un sourcil à Djokovic, qui écarta le danger froidement. Ruud, dans sa magnifique bravoure, avait finalement "omis" un détail : plier cette manche avant que la bête ne se réveille. Et comme on pouvait s'y attendre, la bête s'est réveillée quand elle a flairé l'odeur du tie-break. Une constante chez Djokovic depuis le début de ce Roland-Garros. Une fois de plus, il fut parfait dans l'exercice, qu'il plia 7 points à 1. De quoi soigner encore un peu plus ses stats : 6 jeux décisifs disputés depuis le début de la quinzaine, 6 remportés ; 55 points disputés, 42 gagnés, dont 16 coups gagnants. Et pas la moindre faute directe ! Infernal. Fascinant. Et écœurant (pour l'adversaire).
A partir de là, le destin avait choisi son camp et chacun le pressentait plus ou moins : la chance de Ruud était passée. Le Norvégien avait joué un premier set de très haut niveau et il avait fini par le perdre après un combat d'une formidable intensité physique et mentale (1h21). Que faire contre un Djokovic pareillement en mission ? L'issue légendaire de ce Roland-Garros ne semblait plus être qu'une question de temps.
Un temps long, malgré tout. Car Ruud, loin de baisser les armes, résista encore près de deux heures. Mais il ne pesa plus de la même manière sur le match face à un Djokovic qui, au contraire, ne cessa de monter en puissance, et lui enfonça encore un peu plus la tête sous l'eau en breakant d'entrée de 2e set. Au total des deux derniers sets, Casper ne s'offrit plus la moindre balle de break. Il eut encore sa chance à 4-3, 0-30 au 3e set. Là encore, Djokovic lui claqua la porte au nez. Violemment.
Djokovic, le plus grand par les chiffres
Et puis, au moment de porter l'estocade, "Djoko" exécuta froidement la sentence. A partir de 5-4 contre lui, il aligna 11 points consécutifs pour mener 6-5, 40-0 sur son service. Trois balles de match. Trois balles d'histoire. Il manqua la première, mais (évidemment) pas la deuxième. Une ultime attaque de coup droit impossible à remettre dans le court et il s'écroula au sol, ivre de joie et d'émotion. Le corps étendu sur la terre de son exploit, la tête dans les étoiles. Ce dimanche 11 juin 2023, il a ajouté son plus bel argument au fameux débat lancinant dont le sujet consiste à déterminer le plus grand joueur de l'histoire.
Ce dernier n'est pas clos, bien entendu. Mais en attendant le retour de Rafael Nadal et l'affirmation des plus jeunes, tous les chiffres parlent aujourd'hui en faveur de la légende serbe. Pour rappel :
- Avec 23 Grands Chelems, il est désormais le joueur (masculin) le plus titré de l'histoire en Majeur, seulement dépassé par Margaret Court (24) et à égalité avec Serena Williams (23) chez les dames.
- Il est le premier joueur (masculin) de l'histoire à avoir remporté au moins trois fois chacun des quatre Grands Chelems. Un exploit seulement réalisé par Margaret Court, Steffi Graf et Serena Williams chez les dames.
- Il en est désormais à 21 victoires consécutives en Majeurs et, pour la troisième fois de sa carrière (après 2016 et 2021), il se retrouve à mi-chemin du Grand Chelem calendaire après avoir déjà remporté l'Open d'Australie cette année.
- Il redevient n°1 mondial.
- Accessoirement, il devient (à 36 ans et 20 jours) le vainqueur le plus âgé de l'histoire en Grand Chelem.