US Open – Demi-finales : quatre prétendants, une occasion en or

Casper Ruud (n°5) – Karen Khachanov (n°27)

Seul joueur du dernier carré à avoir déjà atteint une finale en Grand Chelem, Casper Ruud confirme sa très belle régularité et continue de surprendre, à commencer par lui-même ! "Honnêtement, je suis un peu surpris d’être en demi-finale ici mais j’ai beaucoup développé mon jeu sur dur ces deux dernières années, a-t-il avoué en conférence de presse. Je pense que Miami m’a prouvé que je pouvais aller plus loin dans les grands tournois […] A Paris, j’ai aussi eu un déclic et je sais désormais comment jouer du mieux possible en cinq sets". Une expérience Porte d’Auteuil que le 7e joueur mondial a parfaitement fait fructifier durant sa quinzaine new-yorkaise, face à Tim van Rijthoven et Corentin Moutet en quatre manches et contre Tommy Paul, au terme d’une partie bouclée au meilleur des cinq sets en 4h23.

Imperturbable et peu expressif sur le court, le natif d’Oslo n’en reste pas moins un gros combattant toujours fidèle à sa stratégie et capable de faire déjouer ses adversaires. Et ce n’est pas Matteo Berrettini qui dira le contraire. L’Italien a eu beau se rebiffer durant le troisième set de leur quart de finale, il a fini par céder devant l’efficacité redoutable de son vis-à-vis. Confortablement installé dans le top 10 depuis octobre dernier et d’ores et déjà vainqueur de huit titres lors des deux dernières saisons, Casper Ruud vise désormais un sacre en Majeur qui le ferait définitivement changer de dimension. S’il y parvient lors de cet US Open, il deviendra par la même occasion le premier Norvégien à occuper la place de numéro un mondial !

Mais avant de parler d’histoire, il faudra d’abord prendre le dessus sur Karen Khachanov. Pas une mince affaire au vu du magnifique tournoi réalisé par le vainqueur du Rolex Paris Masters 2018. Retombé dans un relatif anonymat ces dernières saisons, le 31e joueur mondial est sorti du bois au bon moment pour s’offrir coup sur coup les scalps de Pablo Carreño Busta (vainqueur à Montréal) et Nick Kyrgios, finaliste de Wimbledon et prétendant au titre. Des victoires qui portent le sceau de la puissance et de l’autorité bien sûr mais aussi d’une sérénité retrouvée, notamment pour résister au retour de l’Australien.

De nouveau sûr de sa force, le joueur le plus âgé (26 ans) de ce dernier carré se refuse à toute forme d’excitation : "J’ai juste réussi, j’ai fait un pas en avant. Je vais jouer ma première demi-finale en Grand Chelem et c’est assez simple dans ma tête. Je suis juste très heureux". Un bonheur qu’il tentera d’amplifier face à Ruud, vainqueur de leur seule et unique confrontation en 2020 sur la terre battue de Rome. Une autre surface et surtout, une autre époque.

Carlos Alcaraz (n°3) – Frances Tiafoe (n°22)

Héros d’un match d’anthologie conclu à 2h50 face à Jannik Sinner, Carlos Alcaraz parviendra-t-il de nouveau à illuminer la nuit new-yorkaise face au héros local Frances Tiafoe ? La question est sur toutes les lèvres tant les deux hommes ont impressionné, signant probablement les deux performances les plus remarquées de ce tableau masculin 2022.

En soi, retrouver le Murcien dans le dernier carré n’est pas une grande surprise au vu de sa saison. Vainqueur de ses deux premiers Masters 1000 à Miami et Madrid, il a depuis longtemps prouvé sa valeur et sa capacité à écraser des adversaires plus prestigieux les uns que les autres, peu importe la surface. Les plus critiques pointaient toutefois du doigt sa stagnation relative en Majeur (malgré son âge), la faute à deux échecs en quarts de finale à New York puis à Roland-Garros. Mais la qualité de son match face à un Zverev en lévitation laissait augurer des jours meilleurs. Et ils sont (déjà) arrivés.

Très costaud pour venir à bout de Marin Cilic, la rage, la puissance et l’énergie déployées pendant les 5h15 de son énorme combat face à Sinner ont laissé pantois tous les amateurs de cette discipline, qu’il est appelé à dominer incessamment sous peu. S’il remporte la première demi-finale en Grand Chelem de sa carrière et que Casper Ruud échoue face à Karen Khachanov, il deviendra le plus jeune numéro un mondial de l’histoire, rien que ça. S’il est opposé au Norvégien en finale, il faudra le battre afin d’être doublement couronné. Mais avec Alcaraz, plus rien ne parait inaccessible.

Reste toutefois à savoir s’il aura suffisamment récupéré de son marathon pour tenir la dragée haute à Frances Tiafoe. De 5 ans son ainé, l’espoir américain a longtemps semblé stagner après un premier quart prometteur à l’Open d’Australie en 2019. Jusqu’ici, regarder un match de Big Foe était l’assurance d’assister à un show au résultat incertain.

Mais le natif de Hyattsville a franchi un sérieux cap durant la quinzaine. Toujours aussi vif et agressif, il apparait désormais comme un joueur serein et sûr de sa force, ce qui ne l’empêche évidemment pas d’assurer le spectacle et d’haranguer la foule à chacune de ses sorties. "J’aime tellement jouer devant une telle foule, a-t-il confié en conférence de presse. J’ai l’impression que c’est pour ça qu’on s’entraîne dur : montrer au monde ce qu’on est capable de faire et ne pas être timide ou avoir peur. Je me sens bien quand les gens apprécient mes efforts et le niveau de jeu. Ça représente beaucoup pour moi de voir toutes ces personnes qui me supportent. Je veux juste continuer d’aller sur le terrain et essayer de donner au public ce qu’il veut : la victoire".

Cette maturité nouvelle a été récompensée par sa plus belle victoire en carrière, face à Rafael Nadal en huitièmes de finale. Un déclic supplémentaire qui lui a sans doute donné la sensation de pouvoir battre n’importe qui, à l’image de sa partition sans fausse note contre Andrey Rublev. En état de grâce, l’Américain a tout tenté et tout réussi ou presque, écœurant son vis-à-vis par sa capacité à élever son niveau de jeu dans les moments clés. Deux victoires prestigieuses dont il devra s’inspirer pour poursuivre son rêve américain. Il pourra aussi se remémorer sa victoire en deux manches sur la terre battue de Barcelone en 2021 lors de son seul duel face à Alcaraz. Même si là encore, on se répète, c’était une autre époque.