Qualifiés pour les demi-finales de ce Roland-Garros 2022, Alexander Zverev et Marin Cilic n’abordent pas ce grand rendez-vous dans le costume de favoris. Opposés respectivement à Rafael Nadal et Casper Ruud, ils peuvent se qualifier pour ce qui serait l’une des finales les plus étonnantes de ces dernières années à Roland-Garros.
Les raisons de croire en Zverev et Cilic
Outsiders dans leurs demi-finales respectives, Alexander Zverev et Marin Cilic peuvent nourrir des espoirs légitimes.
Marin Cilic et Alexander Zverev, c’est avant tout des physiques. Deux colosses aux mensurations quasi-identiques : 1,98m et 88kg pour le Croate, 1,98m et 89kg pour l’Allemand. Des poids lourds du circuit qui ont, malgré leur gabarit, une faculté à se mouvoir hors du commun. Focus sur cinq raisons qui peuvent donner à chacun des raisons d’y croire.
Alexander Zverev
- Le classement ATP
Tête de série n°3, Alexander Zverev avance dans un relatif anonymat, loin du brouhaha qui a accompagné les prestations de Rafael Nadal et Novak Djokovic, l’attention suscitée par l’éclosion de Carlos Alcaraz ou encore les espoirs de confirmation attendus autour de Tsitsipas. Il est pourtant mieux classé que son futur adversaire, Rafael Nadal (5e). Et c’est lui qui, au matin du 13 juin, pourrait être le nouveau n°1 mondial. Pour cela, il doit gagner le tournoi. Ce serait, par la même occasion, la première fois depuis 2003 qu’aucun membre du “Big Three" originel (Federer, Nadal, Djokovic) n’est présent à l’une des deux premières places.
- L’ambition débordante
Le “Big Three” justement, Zverev estime en faire partie. Interrogé en fin d’année dernière par Eurosport Allemagne, il débordait d'ambition. “Avant, on avait l'habitude de toujours parler de Nadal, Federer et Djokovic mais tous les grands tournois de l'année, les Grands Chelems, les Jeux de Tokyo, le Masters, ont été gagnés par Medvedev, Djokovic et moi. Et je ne m'attends pas à ce que ce soit différent l'année prochaine.”
- Les bienfaits des JO
S’il n’a jamais remporté le moindre Grand Chelem, Zverev possède déjà un palmarès bien fourni. Finaliste à l’US Open (2020), il a atteint le dernier carré à l’Open d’Australie (2020) et à Roland-Garros (2021, 2022). Surtout, il a été sacré champion olympique l’an passé avant de remporter quelques mois plus tard les ATP Finals de Turin. “Je suis arrivé au point où je veux gagner, pas simplement où je suis censé gagner, a-t-il expliqué après sa victoire face à Carlos Alcaraz en quarts de finale. Les Jeux Olympiques, pour moi, c’est le plus grand événement au monde.”
Outre sa victoire, ce qui a fait du bien au moral - parfois inconstant - de Zverev, c’est la manière avec laquelle il a renversé Novak Djokovic en demies à Pékin (1-6, 6-3, 6-1). “Nous voulons tous gagner des Majeurs, des Grands Chelems, c'est vrai. Mais il y a aussi la façon dont j'ai battu Novak alors que j’étais mené 6-1, 3-2 et un break pour lui, c’est très important pour moi.” C’est un Zverev totalement décomplexé qui se présentera sur le court ce vendredi.
- La récupération
4h21 face à Félix Auger-Aliassime, 4h12 contre Novak Djokovic. Rafael Nadal vient de disputer deux marathons pour accéder aux demi-finales. Depuis le début du tournoi, le Majorquin a passé 14h55 sur les courts. Une durée sensiblement équivalente à celle d’Alexander Zverev (14h16). Mais la récupération est plus longue pour le Taureau de Manacor (35 ans) que pour son adversaire, de dix ans son cadet.
- Le coach
S’il a obtenu ses résultats les plus probants en début de carrière sur terre battue (victoires aux Masters 1000 de Rome en 2017 et Madrid en 2018, premier quart de finale en Grand Chelem à Roland-Garros en 2018), Alexander Zverev a longtemps buté sur les dernières marches. Pour passer ce cap, il a étoffé son encadrement avec l’arrivée de Sergi Bruguera ces dernières semaines. L’ancien double vainqueur de Roland-Garros (1993, 1994) est un véritable terrien qui a l’expérience de ces rendez-vous en Grand Chelem. Son apport, tant tennistique que mental, est un atout considérable à l’heure de défier le Roi Nadal sur sa terre.
Marin Cilic
- L’expérience
Parmi les quatre joueurs encore en lice, Rafael Nadal et Marin Cilic sont les seuls à avoir déjà remporté un tournoi du Grand Chelem. En 2014 à l'US Open, le Croate avait alors 25 ans et se présentait, avec Stan Wawrinka, comme l’un des successeurs au quatuor qui dominait le circuit depuis près d’une dizaine d’années (Federer, Nadal, Djokovic, Murray). S’il n’a jamais réédité pareille performance, il a néanmoins atteint les finales à Wimbledon (2017) et à l’Open d’Australie (2018). Il est le seul joueur en activité - hors Big Four - à avoir atteint le dernier carré dans chacun des quatre Majeurs de la saison. “C’est incroyable de faire partie de leur club, d’être un des seuls joueurs en activité à avoir été en demi-finales dans chacun des quatre Grands Chelems.” Face à Casper Ruud (23 ans) il a un net avantage dans l’approche de la rencontre puisque le Norvégien n’a jamais dépassé les huitièmes de finale dans un rendez-vous de ce type.
- La condition physique
"L’an dernier, j’ai fait un check-up complet. On m’a dit : ‘Vous avez le corps d’un homme de 25 ans’. Mais ne dites pas à ma femme que je vais continuer à jouer pendant encore 10 ans !” Dans un sourire complice, Cilic a reconnu après sa victoire face à Gilles Simon être en excellente condition physique. Sa capacité à se déplacer sur le court en est la preuve. Autour des terrains, tout le monde est unanime : le Croate n’a jamais semblé aussi fort et affuté depuis son US Open 2014.
- La chute d'une barrière mentale
Il n’avait jamais battu un membre du top 10 à Roland-Garros. Il en a sorti deux en l’espace de trois jours. Après avoir dominé de la tête et des épaules Daniil Medvedev, n°2 mondial, en huitièmes de finale (6/2, 6/3, 6/2), le Croate a enchaîné face à Andrey Rublev, tête de série n°7 battu 5/7, 6/3, 6/4, 3/6, 7/6 (2) en quarts.
- Le calme dans les moments chauds
Cette victoire face à Rublev a prouvé que Cilic détient une qualité essentielle pour aller loin en Grand Chelem : le sang-froid. Poussé au super tie-break (le premier dans l’histoire du court Philippe-Chatrier), il a su serrer le jeu au meilleur moment pour déborder son adversaire, pourtant mieux classé, et se qualifier pour le dernier carré.
- Le service
Avec 69 aces depuis le début du tournoi, Marin Cilic pointe au deuxième rang de ce classement spécifique derrière l’éternel John Isner (71). Il est fort probable qu’il prenne la première place au terme de la demi-finale. Face à Rublev, il a servi la bagatelle de 33 aces pour seulement 2 doubles fautes. Il a marqué 74% des points derrière sa première balle. Ça vaut de l’or. Une valeur refuge dans les moments les plus compliqués à gérer.