Jasmine Paolini va jouer son premier quart de finale en Grand Chelem mercredi après-midi sur le court Philippe-Chatrier, face à Elena Rybakina. À 28 ans, la tête de série n°12 ne cesse de franchir de nouvelles étapes ces derniers mois et culmine désormais à une altitude qu'elle n'avait jamais explorée. Une ascension fulgurante pour une joueuse qui a trop longtemps regardé les sommets d'en bas.
Jasmine Paolini, une arrivée tardive au sommet
Après de longues années dans l'ombre, Jasmine Paolini découvre les sommets du classement sur le tard, à 28 ans.
Lundi, son sourire communicatif ne l'a pas quittée. Probablement était-elle un peu surprise de voir, quelques heures après sa victoire en huitièmes de finale face à Elina Avanesyan, autant de journalistes - une bonne vingtaine - se presser vers la grande salle de presse située sous le court Philippe-Chatrier pour l'assaillir de questions en anglais.
Jusqu'alors, Jasmine Paolini faisait son petit bonhomme de chemin plutôt discrètement dans le tableau féminin, malgré son statut de tête de série n°12. Son exercice médiatique se limitait aux quelques sollicitations des gazettes de son pays, déjà bien occupées par le (futur) premier n°1 mondial de leur histoire, Jannik Sinner, ou par les parcours plus éblouissants les uns que les autres des Lorenzo Musetti, Matteo Arnaldi ou encore Elisabetta Cocciaretto.
Origines, espoir et héritage
À 28 ans, elle en a pourtant connu des interviews, au fil d'une carrière qui a tardé à décoller. Fille d'un père italien et d'une mère polonaise, la native de Castelnuovo di Garfagnana a grandi en Toscane, à l'ouest de la Botte. "Bien sûr, je me sens italienne, je suis née en Italie, j'ai grandi en Italie. Mais je suis fière d'avoir différentes origines, c'est une partie importante de ma vie, lance celle dont le grand-père est ghanéen. Quand j'étais plus jeune, vers mes dix ans, j'allais en Pologne tous les étés. Je parle polonais. Je pense que c'est vraiment quelque chose en plus d'avoir ça en soi. C'est un plus dans sa vie."
La jeune Jasmine, qui avait commencé par la natation avant de prendre possession d'une raquette, faisait partie des espoirs de son pays. Pas la plus précoce, certes, mais elle était de celles qui devaient prendre le relais des Francesca Schiavone, Flavia Penetta et autres Sara Errani. En entrant sur le circuit professionnel il y a dix ans, tout avait d'ailleurs plutôt bien commencé.
À 20 ans, un premier déclic lui a fait quitter les bas-fonds du classement WTA pour se rapprocher du top 200. La suite, elle, a mis un peu plus de temps à se dessiner. Véloce et agile sur le terrain, la joueuse au gabarit explosif (1,60 m) a été moins rapide pour franchir les fameuses étapes d'après, à l'inverse des autres pépites du tennis transalpin. "Je pense que nous menons notre propre chemin, individuellement, notre propre carrière, rappelle-t-elle souvent. Bien sûr, chaque victoire italienne nous aide, ça nous motive individuellement et collectivement. Mais chacun va à son propre rythme."
Quatre ans d'attente, six mois de bonheur...
Avec le temps, Jasmine Paolini a appris à accepter qu'elle ne serait pas l'un de ces diamants bruts ; ceux que l'on déterre suffisamment tôt pour les polir et en faire des bijoux. Sa trajectoire était différente. Entre son arrivée dans le top 100, fin 2019, et son explosion au plus haut niveau, quatre ans se sont écoulés. Cette année, celle de ses 28 ans, elle accélère le rythme. Elle n'avait jamais passé le deuxième tour d'un Grand Chelem en 16 participations ; la voilà qui se hisse en huitièmes de finale à l'Open d'Australie. Elle n'avait jamais disputé la moindre finale en WTA 500 ; elle est allée décrocher le titre au WTA 1000 de Dubaï, en éliminant Beatriz Haddad Maïa et Ons Jabeur, s'il vous plaît.
Comment ? "J'ai travaillé sur moi, que ce soit sur le court ou en dehors, confie-t-elle. Bien sûr, engranger des victoires, ça aide. J'ai affronté de grandes joueuses dans des matchs serrés l'année dernière. Ça m'a aidée à gagner en confiance en moi et à me dire : 'Ok, je peux y arriver !' Au fur et à mesure, j'ai fini par me dire : 'Bon, je peux me faire confiance. Quand je rentre sur le court, je sais que ça va être difficile, mais j'ai toutes mes chances'. Avant, je me disais plutôt : 'Je ne vais pas y arriver, à moins d'un miracle'."
... et un dernier carré ?
Forte d'un puissant coup droit et d'une hargne contagieuse, la Transalpine a atteint la 12e place mondiale il y a un mois. Dans ce Roland-Garros, elle a encore effacé une de ses marques précédentes en atteignant son premier quart de finale en Majeur, malgré un début poussif au tour précédent et un 4-0 encaissé dans le premier set contre Elina Avanesyan. "J'ai essayé d'être plus calme, d’être présente à chaque balle pour marquer des points, de retrouver de bonnes sensations dans mes frappes et d'être plus concentrée sur le court. Quand j'étais au retour, je me disais : 'S'il te plaît, essaie de faire du croisé/décroisé, plutôt qu'un long de ligne'. J'avais commis trop d'erreurs ! Donc j'ai essayé de rester calme, sereine et de mieux lire son jeu. Et ça a marché."
Aujourd'hui, la tête de série n°12 retrouve Elena Rybakina, n°4 mondiale, pour une place dans le dernier carré. Mi-avril, sur l'ocre de Rome, la bataille avait été rude mais finalement remportée par la Kazakhstanaise (6/3, 5/7, 6/3). Mais maintenant qu'elle est lancée vers les sommets, Paolini n'est plus à un exploit près.