Incroyable et terrible dénouement dans la demie des patrons entre Carlos Alcaraz et Novak Djokovic. Alors que les deux hommes en étaient à un set partout dans un combat sans merci, l'Espagnol, victime d'une soudaine crise de crampes au mollet, a laissé filer son adversaire vers une victoire devenue inéluctable. Vainqueur 6/3, 5/7, 6/1, 6/1 en 3h23, Djokovic jouera donc une nouvelle finale à Roland-Garros. Et n'est plus qu'à un match de planter son drapeau au sommet de l'histoire du jeu.
Djokovic, l'incroyable dénouement
Djokovic a remporté par K.O. le choc face à Alcaraz, victime d'une soudaine crise de crampes au milieu du combat.
On avait tout imaginé, sauf ça. Sauf cet événement rarissime et ce dénouement inattendu. Nous en étions à un set partout, 1-0 pour Alcaraz dans le troisième, 40-30 sur l'engagement de Djokovic. Et là, sur un service relativement anodin, l'Espagnol a vu son appui se dérober et son retour de coup droit s'évanouir dans le bas du filet. On l'a vu alors grimacer, claudiquer et finalement aller s'asseoir. Dans l'impossibilité de prendre un temps mort médical immédiat (ce qui est interdit pour les crampes), il a fait le choix de ne pas disputer son jeu de service suivant pour aller s'asseoir au plus vite. Et recevoir son traitement, le temps du changement de côté.
Alcaraz a repris, mais en n'étant plus que l'ombre de lui-même. Djokovic a donc breaké sans jouer, survolé sans forcer ce 3e set avant de s'adjuger définitivement une victoire qui lui permettra de disputer une nouvelle finale à Roland-Garros, la 7e de sa carrière, face à Alexander Zverev ou Casper Ruud.
Des crampes liées à la tension pour Alcaraz
Djokovic aurait-il fini par battre quand même Alcaraz "à la régulière" si ce dernier avait tenu le choc physiquement ? On ne le sait pas, on ne le saura jamais. Ironie du sort, c'est plutôt le Serbe qui paraissait moins bien au sortir d'un 2e set éreintant qu'il avait fini par perdre sur un break blanc, en commettant quatre fautes grossières. A ce moment-là, si l'un des deux semblait devoir perdre le combat physique, c'était plutôt lui.
Tennistiquement en revanche, il avait été le plus fort pendant une bonne partie du match. Djokovic, comme on pouvait s'y attendre, était présent à ce rendez-vous des seigneurs. Il avait pris le match à bras-le corps en disputant une merveille de 1er set sur le plan tactique, variant le jeu à la perfection, se montrant très offensif, mettant au supplice le revers adverse dans la diagonale et remportant sans discussion la bataille du petit jeu.
En face, de manière plus surprenante, Alcaraz avait manqué l'heure du rendez-vous. Très nerveux, commettant beaucoup de fautes, le Murcien était assez loin du niveau de jeu éblouissant affiché face à Stefanos Tsitsipas en quarts de finale. Moins souriant qu'à l'accoutumée, moins explosif aussi, il avait surtout un gros problème : impossible de glisser la moindre amortie à un adversaire qui lisait en lui comme dans un livre ouvert. Et ça, tactiquement, ça lui posait un gros problème. Psychologiquement aussi, sans doute.
Alcaraz semblait plus stressé que d'habitude, c'est d'ailleurs ce qui explique cette crise de crampes subite, alors qu'on ne jouait "que" depuis trois petites heures, ce qui est tout de même honorable en à peine deux sets. "C’est la tension du match qui m’a provoqué ces crampes. J’étais vraiment très nerveux au début du match et je n’ai pas arrêté de faire des efforts dans les deux premiers sets." En effet, le Murcien avait su se remettre dans le bon sens après la perte de la première manche. Il s'est même libéré en réussissant le point du match (sans doute même du tournoi) : un passing extraordinaire de coup droit décoché en se retournant, un peu à la manière de Roger Federer lors d'une autre demi-finale de Roland-Garros remportée en 2006 face à David Nalbandian.
Si on ne peut pas parler d'un Alcaraz à son "prime", son intensité et son énergie ont commencé à porter leurs fruits. Elles lui ont permis de réussir enfin un premier break, après six opportunités manquées, pour se détacher 5-3.
Certes, Djokovic a recollé en débreakant illico et en sauvant surtout trois premières balles de set sur son service à 5-4, 0-40, alignant à cet instant précis cinq points extraordinaires. Mais il a fini par craquer pour de bon à 6-5 avec un nouveau jeu de service totalement caviardé. "A ce moment-là, je ne me sentais vraiment pas frais physiquement", reconnaîtra-t-il ensuite au micro d'Alex Corretja. De l'autre côté du filet, rien ne laissait présager ce qui allait suivre.
Après une pause aux vestiaires, "Djoko" est revenu sur le court avec les jambes et les idées fraîches. Comme à peu près tout le stade, il imaginait sans doute qu'on allait entrer dans le vif du sujet et rester encore très longtemps sur le Philippe-Chatrier. Cinq minutes plus tard, c'était fini. Le pur-sang espagnol, fauché en pleine course, était contraint au refus d'obstacle.
Djokovic, le rendez-vous avec l'histoire
Lorsque survint subitement cette fameuse crampe au mollet à 1-1 au 3e, Alcaraz s'est fait manipuler mais cela n'a rien changé. Le long détour par les vestiaires à la fin d'une troisième manche bouclée en un éclair n'a pas été plus efficace.
Alcaraz a refusé d'abandonner. Il est allé jusqu'au bout de son calvaire, ce qui est tout à son honneur. Mais il a perdu 11 des 12 derniers jeux d'une symphonie inachevée qui laissera forcément un goût amer, y compris pour le vainqueur du jour. "Personne n'a envie de gagner de cette manière, je me sens désolé pour Carlos, a encore déclaré Djokovic après son match. Mais il est jeune, il gagnera ici plusieurs fois, j'en suis persuadé."
Novak Djokovic, lui, tentera de décrocher dimanche son 3e Roland-Garros. Ce qui lui permettrait de redevenir n°1 mondial devant Carlos Alcaraz. Et de devenir le joueur le plus titré de l'histoire en Grand Chelem au nez et à la barbe de Rafael Nadal. Le tout, dans le royaume du Majorquin.