Barty pour durer ? Cinq raisons de le penser…

L'Australienne a les moyens de s'établir durablement au top.

 - Rémi Bourrieres

Si le sacre d'Ashleigh Barty à Roland-Garros relève d'une vraie surprise, l'Australienne a démontré des qualités qui peuvent lui permettre de s'établir durablement au sommet. De nombreux experts le pensent. Et pas des moindres.

 

Dans le tennis féminin, depuis quelques années, la vérité d'un jour n'est pas forcément celle du lendemain. A Roland-Garros, Ashleigh Barty est devenue la neuvième joueuse différente à s'imposer sur les dix derniers Grands Chelems. Seule exception notable : Naomi Osaka, devenue la première joueuse à faire suivre un premier titre majeur (l'US Open 2018, en l'occurrence) par un autre titre majeur dans la foulée (l'Open d'Australie 2019) depuis Jennifer Capriati en 2001 (Open d’Australie puis Roland-Garros).

Barty a-t-elle les moyens de suivre les traces de la numéro un mondiale – qu'elle talonne désormais au classement WTA - et s'établir durablement au sommet ? Ils sont nombreux à le penser.

1/ Elle a toutes les armes

Techniquement, quel est le point faible d'Ashleigh Barty ? On a peine à le dire. A contrario, nombreux sont ceux qui se sont enthousiasmés sur son service, particulièrement efficace en regard de son "petit" 1,66 m. Mais aussi de son coup droit de décalage, son revers slicé ou sa volée, "de loin la meilleure du circuit féminin !, s'exclame son compatriote  Pat Cash – un connaisseur -, vainqueur de Wimbledon en 1987. En fait, elle fait tout très bien et elle a une grande intelligence de jeu. J'adore sa façon "old school" de construire ses points."

Le tennis féminin a trop souvent été fustigé par son caractère unidimensionnel pour ne pas saluer ce tournoi marqué par la résurgence d'un tennis très varié. Ashleigh en aura été la reine. "Contrairement à ce qu'on dit, il y a toujours eu des jeux variés pour s'illustrer chez les filles, notamment sur terre battue, rappelle Patrick Mouratoglou. Là, on en a vu beaucoup, c'est vrai, également parce les meilleures n'ont pas tenu leur rang."

Pour l'entraîneur de Serena Williams, il ne fait aucun doute que "Barty va s'installer dans le top 5." Jusqu'où ? "Trop tôt pour le dire : on verra comment elle gèrera l'après Roland-Garros."

2/ Elle a énormément progressé… et reste perfectible

Craig Tyzzer, qui entraîne Barty depuis 2016 (il a pris la suite de Jim Joyce, qui reste un proche conseiller de la joueuse), ne se fait justement pas – trop - de souci sur la manière dont Barty gèrera ce sacre. "C'est une joueuse très humble, très travailleuse, extrêmement exigeante. Elle ne va pas en rester là…"

D'autant que Barty est lancée, depuis le début de l'année, sur une trajectoire fulgurante. "Elle a particulièrement progressé au service et en revers", estime Pat Cash. Surtout, elle sait désormais comment exploiter toutes ses armes. Elle a imbriqué toutes les pièces du puzzle."

"Elle a pris le temps de développer ce tennis complet, détaille Craig Tyzzer. Elle s'est aussi servi du double pour améliorer son jeu au filet. Tout cela n'est pas inné. D'ailleurs, elle a encore pas mal de choses à améliorer…"

Roland-Garros 2019 - Barty - Tyzzer©Corinne Dubreuil / FFT

3/ Elle est plus sereine et plus confiante

C'est notamment ce qui frappé l'illustre compatriote de la joueuse aux origines aborigènes, Rod Laver. "Là où Ashleigh s'est peut-être le plus amélioré, c'est dans l'attitude, s'enthousiasmait le seul auteur du Grand Chelem (masculin) dans l'ère Open, il y a cinquante ans. Avant, elle avait tendance à baisser la tête à chaque fois qu'elle faisait une faute. Désormais, elle reste toujours concentrée. Elle garde confiance, même quand elle en difficultés."

Cette confiance, Barty l'a construite avec ses nombreuses victoires, notamment cette année à Miami. Mais ça part de plus loin. "Elle a travaillé là-dessus, elle s'est fait aider, dévoile Craig Tyzzer. Le fait d'avoir pris son break de deux ans (durant lesquelles elle s'était mise au cricket, ndlr) l'a probablement aidée. Elle n'arrivait plus à endurer le poids des attentes. Désormais, elle sait à quel point elle aime le tennis."

4/ Elle n'était pas une terrienne... avant !

Ce n'est pas à Roland-Garros, où elle n'avait remporté que deux matches dans sa carrière, qu'on attendait le plus Ashleigh Barty. Plutôt à Wimbledon, où elle s'était imposée chez les juniors en 2011, à 15 ans. Ou chez elle en Australie, sur dur, surface sur laquelle elle avait remporté trois de ses quatre titres. Sur terre battue, la joueuse d'Ipswich (non loin de Brisbane) n'avait jamais disputé de finale.

"D'habitude, quand arrivait la terre battue, elle était contente car le gazon approchait ! sourit son entraîneur. C'est le fait d'avoir amélioré son revers slicé et son service kické qui l'a aidée à passer ce cap sur cette surface. Désormais, avec toutes ses armes, Ashleigh est capable de battre n'importe quelle joueuse sur n'importe quelle surface."

5/ Elle est très entourée

Il est assez rare de voir une joueuse susciter autant l'unanimité. Sitôt son sacre en poche, Ashleigh a suscité un flot de félicitations sur la twittosphère, notamment parmi ses pairs. Samantha Stosur, qui restait la dernière Australienne à avoir remporté un Grand Chelem (US Open 2011), a été l'une des plus promptes à réagir. Mais on a noté aussi beaucoup de messages émanant de rivales directes de Barty.





Cette dernière appréciait bien sûr cet élan de sympathie. Mais saluait en premier la qualité de son entourage. "J'ai une équipe incroyable, et ce qui m'arrive aujourd'hui résulte avant tout du travail effectué avec elle."