Duels au couteau, retournements de situation, personnalités atypiques, épisodes méconnus : au cours de cette édition 2022, le site officiel du tournoi vous propose de revisiter quelques moments mythiques de l’histoire de Roland-Garros. Épisode 3 : Adriano Panatta, vainqueur en 1976, le seul à avoir su interrompre le joug de Björn Borg, vainqueur à six reprises Porte d’Auteuil entre 1974 et 1981.
Il était une fois… Panatta, l’homme qui battait Borg
Épisode 3 : Adriano Panatta, vainqueur en 1976, le seul à avoir su interrompre le joug de Björn Borg Porte d’Auteuil.
Toute proportion gardée, la performance d’Adriano Panatta, vainqueur de Roland-Garros 1976, ressemble aux trois succès en Grand Chelem de Stan Wawrinka et Andy Murray. On s’explique. À l’époque de l’Italien, Björn Borg a fait de Roland-Garros sa chasse ultra-gardée, tout comme le Big Three (Roger Federer, Rafael Nadal et Novak Djokovic, on précise, sait-on jamais…) a confisqué les titres en Grand Chelem. Mais Panatta, tout comme le duo Wawrinka/Murray avec les trois ogres, a su briser, au moins provisoirement, l'hégémonie de son insatiable contemporain.
1976, donc. C’est l’année folle d’Adriano Panatta. Celle qui va faire de lui un mythe. Au-delà de sa belle gueule, le Romain emballe surtout les foules par son jeu d’attaque. Il remporte coup sur coup les Internationaux d’Italie et Roland-Garros au prix de mille péripéties. Comme protégé par la Madone, le bel Adriano sauve… onze balles de match au premier tour en Italie, puis encore une autre dès son entrée en lice à Paris, contre Pavel Hutka, sur un point spectaculaire resté célèbre.
Chaussures perdues et main droite blessée
Tel un héros de roman d’aventure, le Latin a plongé sur un passing croisé de son adversaire, qui en est resté coi d’admiration... Tombé à la renverse sur cette volée de revers, Panatta s’est relevé tout sourire... pour remettre en place sa mèche de cheveux ! Ce magnifique morceau de bravoure a changé sa vie : dix jours plus tard, il devient le deuxième Italien après Nicola Pietrangeli à inscrire son nom au palmarès de Roland-Garros. Rien n’a pu l’arrêter. Pas même la disparition de ses chaussures fétiches avant sa demi-finale, ni une blessure le matin de la finale, alors qu’un ami lui a fermé la portière d'une voiture sur la main droite.
Ce parcours parisien laisse dans le souvenir de ceux qui le suivirent la trace lumineuse d'un coup d'épée. Adriano embrocha tour à tour Björn Borg en quarts de finale, Eddie Dibbs en demi-finales et, pour finir, monsieur "balle en cloche", l’Américain Harold Solomon.
"Sans amortie, c'est difficile de gagner pour un attaquant."
Le climax de cette quinzaine est évidemment sa victoire face à Björn Borg. L’Italien a trouvé depuis bien longtemps la clé pour perturber le jeu de métronome du Suédois. Depuis 1973, les deux hommes se sont affrontés à dix reprises et "Il Bello" Adriano l’a emporté cinq fois. Et surtout, en 1973, il a stoppé dans l’œuf l’éclosion du jeune Suédois lors de sa première participation à Roland-Garros. "Son jeu me plaisait beaucoup car il n’attaquait jamais", raconte l’Italien. Cette victoire en quatre manches est annonciatrice de celle de 1976. Cette année-là, les deux hommes se retrouvent en quarts de finale.
Sur la lancée de son titre à Rome et de son sauvetage au premier tour de Roland-Garros, Panatta affiche évidemment une confiance éclatante. Il s’impose 6/3 6/3 2/6 7/6 au terme d’un cocktail de slices de revers, d’exploits au filet et d’amorties à répétition. Ce succès, Panatta lui-même l’explique par une utilisation récurrente, voire abusive, de ce coup. "L'amortie, c'est essentiel, explique-t-il. Sans amortie, c'est difficile de gagner pour un attaquant. Il faut mélanger approches, attaques, coups gagnants et amorties." Un tennis inspiré et inspirant qui retrouve des couleurs ces temps-ci sur le circuit. Comme un hommage au jeu de Panatta.