Et à la fin, c’est Novak Djokovic qui gagne. Opposé au chouchou du public Jannik Sinner dans un remake de leur sublime rencontre de groupe, le n°1 mondial n’a laissé aucune place au doute ou au suspense (6/3, 6/3 en 1h43) pour soulever son septième trophée de maître et ainsi définitivement dépasser Roger Federer (6 sacres). En mission, il a bouclé en beauté un exercice 2023 absolument exceptionnel.
Finales ATP : Novak Djokovic, masterclass n°7
Bousculé en poules, le Serbe a étrillé la nouvelle génération en phase finale pour remporter son 7e Masters et s’adjuger un nouveau record.
"Quand le vrai Novak arrive sur le court, personne ne peut rivaliser"
L’histoire ne le retiendra sans doute pas mais Jannik Sinner a tenu un rôle tout particulier dans la conquête du nouveau graal de "Nole". D’abord bourreau pour la première fois de sa carrière (il avait perdu leurs trois premières confrontations) lors du deuxième match de poule, l’Italien s’est mué en sauveur, en prenant le meilleur sur Holger Rune dans la troisième et dernière rencontre du groupe vert. Sans ce succès à l’arraché (6/2, 5/7, 6/4 en 2h32), le "Djoker" n’aurait pas été au rendez-vous du dernier carré…
Une qualification in extremis qui a également fait office de déclic pour un champion qui exècre le fait de ne pas avoir son destin en main. Malmené par Rune puis Hurkacz et donc battu par Sinner au terme de l’un des plus beaux thrillers de l’année (7/5, 6/7(5), 7/6(2)), il devait élever son niveau de jeu pour venir à bout des deux meilleurs représentants de la nouvelle génération. "Après avoir assuré la place de n°1 mondial en fin d’année face à Rune, je n’étais plus totalement dans mon tournoi, sur le plan mental, a-t-il confié en conférence de presse. Je n’y étais qu’à moitié et ça s’est reflété sur mes performances et mes sensations sur le court. Objectivement, je dois remercier Jannik de m’avoir permis de participer aux demi-finales. Une fois qualifié, je me suis dit que j’allais essayer de passer à la vitesse supérieure et c’est ce que j’ai fait, j’ai joué deux matchs de très haut niveau."
Un mode "intouchable" que son coach Goran Ivanisevic connait parfaitement. "Je savais que dès qu’il serait qualifié pour les demi-finales, il gagnerait le tournoi, a confirmé le Croate à l’issue de la finale. Sa mentalité a changé et le nouveau Djokovic est entré sur le court samedi. Et quand le vrai Novak arrive sur le court, personne ne peut rivaliser avec lui."
Une leçon à la nouvelle génération
Premier candidat à avoir voulu s’intercaler entre le Serbe et l’histoire, Carlos Alcaraz a été balayé comme rarement cette année (6/3, 6/2 en 1h28). Etouffé par la puissance des frappes et la longueur de balle du boss du circuit, le vainqueur de Wimbledon n’est pour autant pas passé à côté de ce grand-rendez-vous, il n’a simplement jamais trouvé la solution. Une domination sans partage qui – et c’est assez rare pour être signalé – a fait sortir le Murcien de ses gonds après un point magnifique, synonyme de nouveau break. "J’ai joué mon meilleur tennis sur ce point et même là, je l’ai perdu, a-t-il analysé après la demi-finale. Juan Carlos (Ferrero) m’a dit que je devais rester fort mentalement mais je n’y arrivais pas […] Ce que Novak parvient à faire est incroyable, il aligne les records, gagne tous les tournois qu’il dispute, c’est fou."
Habité et en mission, le tenant du titre a réitéré cette performance époustouflante pour prendre une étincelante revanche sur Jannik Sinner en finale. Tendu pour sa première finale en Masters et probablement dans le dur physiquement, l’Italien n’a pas été en mesure de livrer la même bataille que lors de la phase de poules. Surtout, de l’autre côté du filet, son adversaire a enfilé son costume de monstre, taillé sur mesure lorsque l’ambiance est hostile et que l’enjeu est immense. Agressif dès les premiers échanges, Djokovic a sauté sur sa première opportunité pour prendre les commandes. Chirurgical sur son engagement, il n’a perdu que deux petits points dans cet exercice au cours d’une première manche bouclée 6/3 en 38 minutes.
Une fois les crocs plantés, il n’a évidemment pas relâché son étreinte en breakant blanc et en s’adjugeant les dix premiers points du deuxième set. Dos au mur, le natif de San Candido a jeté ses dernières forces dans le combat pour s’octroyer deux balles de débreak alors que le tableau de score affichait 2-3. Des occasions balayées d’un revers de raquette par le patron de la discipline, bien déterminé à conclure son récital le plus rapidement possible.
Seulement breaké à deux reprises lors de ses quatre premiers matchs, Sinner a concédé trois fois sa mise en jeu lors de cette finale, tristement conclue par une double faute (6/3, 6/3 en 1h43). "Je pense que mes matchs contre Alcaraz et celui de ce soir sont probablement les deux meilleurs que j’ai joués cette saison, a confirmé le vainqueur de cette édition 2023. Jouer Sinner devant son public, la manière dont j'ai terminé le tournoi et la saison... C'est incroyable. Je devais me surpasser et c'est ce que j'ai fait. Je suis très, très fier de ma performance."
Déçu du résultat mais heureux de son parcours, le protégé de Darren Cahill n’a pas manqué de saluer le nouvel accomplissement de son adversaire. "Je pense qu’il fait de moi un meilleur joueur, comme tous ceux contre lesquels j’ai perdu, a concédé le finaliste. Il est dans une forme incroyable, nous allons le voir encore pendant je ne sais combien d’années ! Il est une source d’inspiration parce qu’il a travaillé de la bonne manière tout au long des années précédentes pour en arriver là […] Mentalement, vous devez comprendre très vite ce qu’il se passe sur le court et c’est ce qu’il fait mieux que personne. Il joue très bien dans les moments importants, il sait comment gérer la situation, surtout en demi-finale et en finale."
"Une des meilleures saisons de ma vie"
Ce septième sacre lors des finales ATP vient conclure une saison 2023 quasi-parfaite pour celui qui entame ce lundi sa 400e semaine au sommet de la hiérarchie. Une année au cours de laquelle il a amélioré de nombreuses marques, portant son record de Majeurs à 24 et de Masters 1000 à 40. "C’est très spécial, c’est l’une des meilleures saisons de ma vie, sans aucun doute, a poursuivi celui qui a remporté sept titres (pour porter son total à 98) et qui a bouclé son exercice avec un bilan de 55 victoires pour seulement 6 défaites. Gagner mon 23e tournoi du Grand Chelem à Roland-Garros a été l’un des principaux tournants de ma saison. Je pense que ça m’a donné des ailes pour le reste de l’année. Depuis, j’ai perdu deux matchs et gagné de nombreux tournois."
Et comme l’a très justement confié sa dernière victime en date, rien ni personne ne semble pouvoir empêcher le vainqueur le plus âgé de l’histoire du Masters (36 ans et 181 jours) de poursuivre son incroyable moisson de records. Loin d’être rassasié, ses ambitions pour 2024 seront les mêmes qu’en 2023 : gagner, partout, tout le temps. Et ça tombe bien puisque cette nouvelle saison sera notamment marquée par les Jeux Olympiques de Paris, seul grand titre qui manque encore à son immense palmarès.
"J’ai toujours eu les plus grandes ambitions et les plus grands objectifs. Cela ne changera pas l’année prochaine, c’est certain. Ma motivation est toujours là. Mon corps m’a bien rendu service, il m’a suivi et j’ai une excellente équipe autour de moi. Je vise les tournois du Grand Chelem, le Masters et je l’espère, les Jeux Olympiques. L’état d’esprit est le même, je vais continuer à aller de l’avant. Je ne sais pas si je serai aussi bon l'année prochaine... Rune, Alcaraz et Sinner sont les trois prochains grands, si vous voulez les appeler ainsi. Ils vont porter ce sport. Mais je m'accrocherai aussi longtemps que je pourrai gagner contre eux. Pourquoi s'arrêter si l'on continue à gagner les plus grands titres ? Une fois qu'ils commenceront à me botter les fesses, j'envisagerai probablement de faire une petite pause ou peut-être une pause définitive dans le tennis professionnel" a-t-il conclu.
Profitez de la trêve hivernale pour changer les piles de votre calculatrice : elle vous sera utile en 2024, à l'issue des nouvelles masterclass de "Nole".