Un peu plus d’un mois après leur dernière bataille à Roland-Garros, Carlos Alcaraz et Novak Djokovic se retrouvent sur le Centre Court de Wimbledon. Le premier vise un deuxième titre en Grand Chelem, après l’US Open 2022. Le second espère décrocher son 24e Majeur et sa 8e couronne (la 5e consécutive) au All England Club. Une finale idéale, un troisième duel pour la gloire et l’histoire de la discipline.
Wimbledon : Alcaraz – Djokovic, un festin grandiose
Opposés dans une finale de rêve, les deux meilleurs joueurs du monde s’affrontent pour un titre du Grand Chelem et la place de n°1 mondial.
Enjeux multiples
"Je ne pense pas que les gens s’attendaient à ce qu’il joue aussi bien sur gazon parce que son jeu est essentiellement construit et développé pour la terre battue ou le dur. Mais il a incroyablement bien réussi à s’adapter aux exigences de la surface et aux défis proposés par ses différents adversaires. Je considère que c’est un grand trait de caractère, une grande vertu. Ça a été l’une de mes plus grandes forces tout au long de ma carrière, j’ai été capable de développer, d’adapter et d’ajuster mon jeu en fonction des défis à relever. C’est ce qu’il fait très tôt dans sa carrière." Le compliment est signé Novak Djokovic et s’adresse bien sûr à Carlos Alcaraz.
Programmé pour dominer le circuit à court, moyen et long terme, le Murcien a bel et bien surpris tout le monde en s’adaptant aussi vite à l’herbe londonienne. Stoppé ici même en huitièmes de finale l’an passé par Jannik Sinner, il a pris ses marques et engrangé de la confiance en disputant le Queen’s avant de poser ses valises dans le temple du tennis.
Un tournoi préparatoire qu’il n’a pas pu s’empêcher de remporter, envoyant un premier signal à la concurrence et reprenant au passage la place de n°1 mondial. Un siège doré sur lequel pourrait de nouveau s’asseoir le Serbe en cas de sacre ce dimanche. "C’est une motivation supplémentaire mais je pense que c’est surtout très spécial de jouer une finale contre une légende de notre sport, a confié "Carlitos". Si je gagne, ce sera extraordinaire pour moi, non seulement parce que c’est un titre à Wimbledon mais parce que c’est contre Novak." Une pression énorme et un double enjeu déjà surmontés à New York à la différence près que son adversaire n’était pas l’invincible maître des lieux…
Le défi ultime
Impressionnant durant cette quinzaine au cours de laquelle il a notamment écarté Holger Rune avant d'étouffer Daniil Medvedev, ses coups droits surpuissants, ses amorties léchées et sa vitesse de déplacement ont fait des ravages. Comme son futur vis-à-vis, Alcaraz n’a perdu que deux sets en route et n’a passé que 9 minutes de plus sur les courts.
Un sentiment de domination similaire donc mais un réel déficit d’expérience et une interrogation quant à la gestion des émotions. "Ce sera évidemment un moment très émouvant pour moi mais je vais essayer de rester calme, a-t-il annoncé. Pour Novak, c’est juste un jour de plus, un grand moment de plus […] Je dis toujours que pour être le meilleur, il faut battre les meilleurs. Novak en fait évidemment partie et ce serait incroyable de le battre."
Si les doutes sont plus que permis, c’est aussi parce que le prodige de 20 ans est passé à côté de son précédent grand rendez-vous. Après avoir fait jeu égal pendant deux sets dans un duel sans merci, il s’est retrouvé perclus de crampes liées au stress, à la fatigue et à l’énorme tension autour de cette demi-finale de Roland-Garros. "Je vais essayer d’entrer sur le court avec moins de nervosité qu’à Paris, a-t-il promis. Je pense que je serai meilleur ce dimanche. Physiquement, je vais me préparer de la même manière mais mentalement, je vais tenter quelque chose de différent pour rester calme. Je vais faire des exercices et essayer d’oublier que je vais jouer une finale contre lui."
Reste à savoir si le déni peut porter ses fruits au moment de se retrouver au pied d’une montagne littéralement infranchissable depuis 6 ans, 34 matchs et même 45 si on ne compte que le Centre Court. Un mythe, une légende qui dispute sa 35e finale de Grand Chelem en 71 participations, record absolu hommes et femmes confondues (devant Chris Evert, 34).
Plus personne ne bat Djokovic dans les grands rendez-vous et encore moins dans son deuxième jardin. Des grands joueurs aux meilleurs représentants de la nouvelle génération, tous se sont cassés les dents sur sa défense de fer. Par sa justesse, sa gestion des moments clés, son physique et son emprise psychologique, se mesurer au "Djoker" dans une rencontre en cinq sets s’apparente au défi ultime. C’est évidemment encore plus vrai au All England Club.
Un appétit légendaire
Le pire pour la nouvelle génération – les deux hommes ont 16 ans de différence, soit le 3e plus grand écart d’âge de l’ère Open dans une finale de Grand Chelem –, c’est que Novak Djokovic n’est pas rassasié, loin de là. "Quand je dispute un tournoi, l’ambition est toujours la plus élevée : gagner le titre, a confirmé celui qui n’est plus qu’à un Majeur d’égaler le record historique de Margaret Court. Cela ne changera jamais, quelle que soit la place qu’une victoire occupe dans les livres d'histoire. La pression est là et elle est toujours très forte. J’ai toujours le trac et la chair de poule avant chaque match. Je vais aborder cette finale comme si c’était la première."
S’il se méfie évidemment de l’adversaire le plus dangereux qu’il ait eu à affronter au cours de sa quinzaine, tout le monde est prévenu de son ambition et de sa motivation. "Je veux remporter ce titre. J'ai hâte d'y être et je pense que c’est le plus grand défi que je puisse relever en ce moment, sous tous les angles : physique, mental, émotionnel. Alors oui, j'ai plus d'expérience que lui, j'ai participé à beaucoup plus de finales de Grand Chelem ou de Wimbledon. Mais il est en pleine forme. Il est très motivé. Il est jeune. Il a faim. Moi aussi, j'ai faim, alors faisons un festin" a-t-il conclu, un sourire malicieux irradiant son visage.
Installez-vous confortablement, sortez l’argenterie et les verres en cristal et prenez part à l’un des plus grands banquets de l’année.