Les deux derniers vainqueurs masculins autoritaires et sûrs de leurs forces, une future numéro un mondiale en haute altitude et un sourire éclatant sur le visage d'une star maison : les quarts de finale de cet US Open 2023 ont définitivement livré leur verdict ce mercredi.
US Open J10 : Alcaraz et Sabalenka (beaucoup) trop forts
La championne de Melbourne et le tenant du titre ont livré une démonstration de maîtrise et de puissance pour retrouver le dernier carré à Flushing Meadows.
Carlitos annonce la couleur
Après avoir "annulé" le quart de finale tant attendu contre Jannik Sinner grâce à son succès marathon lundi soir, Alexander Zverev voulait continuer de jouer les trouble-fête en évinçant le champion en titre avant les demies et ainsi priver fans et observateurs d’une finale annoncée et espérée face à Novak Djokovic (qui affrontera le phénomène Ben Shelton ce vendredi). Mais malgré un niveau de jeu pleinement retrouvé et quelques bonnes intentions depuis le fond du court, le finaliste de l’édition 2020 n’a pas fait le poids (6/3, 6/2, 6/4 en 2h30).
Il faut dire que même sans tout réussir (34 fautes directes pour 29 coups gagnants), Carlos Alcaraz a été clinique dans les moments cruciaux. Surtout, il semble constamment évoluer un cran – voire davantage – au-dessus de ses adversaires. Ses courses, sa capacité à déclencher n’importe quand, ses variations illisibles, le bruit de sa frappe de balle… Chaque mouvement est l’occasion pour les spectateurs de retenir leur souffle avant d’hurler leur joie, de concert avec le désormais célèbre "VAMOS" du principal intéressé. "J’évolue à mon meilleur niveau sur ce court. L’année dernière, c’était très difficile parce que des huitièmes jusqu’à la finale, je n’ai joué que des matchs en cinq sets" a confié celui qui n’a laissé filer qu’une manche cette année, contre Dan Evans.
Et cette nouvelle chaude soirée new-yorkaise n’a pas fait exception. S'il y a bien eu un round d’observation de six jeux accrochés entre les deux hommes, l’Allemand n’a pas réussi à saisir la moindre opportunité sur l’engagement adverse (0/5) quand son vis-à-vis signait de son côté un 100% de réussite (4/4). Pour boucler cette première manche, "Carlitos" a sonné une énorme première charge, dégainant trois coups de canon en retour avant d’assurer en patron sur son service. A l’issue d’un deuxième set avare en suspense et durant lequel le 12e joueur mondial semblait payer ses 4h41 de combat au tour précédent, l’affaire paraissait déjà entendue.
L’interruption de neuf minutes liée au temps mort médical réclamé par Sascha (il a confirmé des douleurs aux ischios-jambiers lors de sa conférence de presse) n’a pas changé la face du monde. S’il a redoublé d’efforts pour garder la tête hors de l’eau le plus longtemps possible, il n’avait pas les armes pour emmener le numéro un mondial dans un plus long combat. Les amorties par-ci et les frappes monumentales en coup droit et en revers par-là ont donné à ce quart de finale des allures de correction.
De bon augure avant de retrouver un excellent Daniil Medvedev dans le dernier carré. Un adversaire que le protégé de Juan-Carlos Ferrero avait croisé au même stade de la compétition sur la route de son merveilleux sacre londonien. "Je me sens très bien physiquement, j’ai de très bonnes sensations sur le court, a-t-il poursuivi. Je me sens fort mentalement et je suis prêt à livrer une belle bataille contre Daniil."
Le tirage au sort promettait l'enfer à celui qui reste sur un bilan de 17 victoires pour une seule défaite cette saison en Grand Chelem. Il n’est déjà plus qu’à deux (grosses) marches du paradis.
Family Business
On connait le sujet du prochain repas de famille entre Daniil Medvedev et le parrain de sa fille Alisa, Andrey Rublev. Réunis sur un court Arthur Ashe aux allures de sauna, les deux compères n’ont pas tellement échangé les banalités à l’occasion de leur huitième confrontation en carrière. Sous les yeux de la légende Michael Phelps et de spectateurs eux-mêmes transpirants et donc en admiration devant les efforts fournis sur le terrain, ils ont offert un spectacle d’une grande intensité, multipliant les bras de fer depuis le fond de court et tentant toujours de faire une dernière différence le long d’une ligne ou dans la diagonale.
Conséquence directe de cette implication et des prises de risques, cette partie a comptabilisé la bagatelle de 14 breaks pour 15 jeux de service remportés ! Des renversements de situation en pagaille donc, mais une impression vérifiée : le n°3 mondial a toujours plus ou moins gardé la main, pour recoller ou décoller. Un scénario qui donnera forcément des regrets au champion de Monte-Carlo mais il faudra se souvenir que les deux hommes ont tout donné physiquement et mentalement pour tenter de se hisser dans le dernier carré.
Comme lors de sa rencontre face à Alex de Minaur, Daniil Medvedev a d’ailleurs dû faire appel au corps médical du tournoi pour obtenir de la Ventoline. "C'était brutal. Dans ces conditions, la seule chose positive c’est que les deux joueurs souffrent, a expliqué le vainqueur sur le terrain. C'était difficile pour nous deux et il y a eu des hauts et des bas, c'est normal. À la fin du premier set, je ne voyais plus la balle. Avant les points je me disais qu’il ne pouvait plus bouger donc j’essayais de le faire courir le plus possible mais il était tout le temps sur la balle ! On a ressenti la fatigue tout le match, c’est une victoire très difficile et des conditions horribles. Je savais qu’il n’allait rien lâcher et il savait que je n’allais rien lâcher !"
Finalement vainqueur de cette affiche qui a tenu toutes ses promesses (6/4, 6/3, 6/4 en 2h48), le champion 2021 atteint les demies à New York pour la 4e fois de sa carrière en autant de tentatives. A l’inverse, Andrey Rublev échoue à ce stade pour la 4e fois à l’US Open, la 9e en Grand Chelem (record de l’ère Open). Comme en 2020, c’est bien son ami qui poursuit son chemin, où l’attend donc Carlos Alcaraz.
Sabalenka, ode à la régularité
Sur l’échiquier des plafonds de verre brisés en Grand Chelem, difficile de trouver actuellement plus éloignés qu’Andrey Rublev et Aryna Sabalenka. Invincible à ce stade de la compétition, la reine de Melbourne n’est que la 2e joueuse de l’ère Open à avoir remporté ses sept premiers quarts de finale en Grand Chelem, derrière l’indétrônable Chris Evert (48 !). Elle a aisément poursuivi sa série en disposant de la prometteuse Qinwen Zheng (6/1, 6/4 en 1h13). Un succès qui lui ouvre les portes du top 4 pour la troisième fois consécutive à New York. Ce vendredi, elle disputera sa 5e demi-finale d’affilée en Majeur, la 4e de l’année, une première depuis Serena Williams en 2016.
Une fois évoqué ce nouvel accomplissement par les chiffres – preuve s’il en fallait de sa très belle régularité – que retient-on de son succès express ? D’abord, que la future boss de la WTA n’a passé que 6h pile sur les courts de Flushing Meadows, ne lâchant que 21 jeux à ses différentes victimes. D’excellents temps de passage qui trouvent une explication partielle dans la maîtrise de sa mise en jeu. "Intégrer un spécialiste de la biomécanique dans mon équipe n'a pas été une décision difficile mais c'est un vrai changement parce qu'avant, je n'étais pas très ouverte à ce genre de concepts, a-t-elle détaillé en conférence de presse. Je suis contente et fière de moi d'avoir réussi à m'ouvrir à ces nouvelles choses, qui m'ont aidée à maîtriser mon service et à me rendre plus forte sur le court."
Contre la tombeuse d’Ons Jabeur, elle a remporté 88% de points derrière sa première balle (23/26), n’a servi que trois doubles fautes et n’a pas été confrontée à la moindre balle de break. Difficile alors pour la joueuse chinoise - placée très loin de sa ligne de fond - de tenir la distance, d’autant plus qu’elle s’est retrouvée agressée et étouffée sur son propre engagement. Aryna Sabalenka a remporté 25 des 36 premiers points de la rencontre. Au cours d'une deuxième manche légèrement plus équilibrée, la protégée de Wim Fissette est parvenue à sauver une balle de match sur son service avant d’être une nouvelle fois impuissante dans le jeu suivant.
Sereine et lancée comme une fusée vers une deuxième finale en Majeur, elle jouera ce jeudi face à Madison Keys. Mais aussi contre tout un public derrière sa championne. "Ce serait compréhensible qu'ils supportent Madison plus que moi, évidemment. J’ai déjà joué dans des stades où les spectateurs encourageaient mon adversaire. Ça ne me dérange pas, je vais juste essayer de rester concentrée et de jouer mon meilleur tennis. J’ai mon équipe dans ma box, ma famille et des amis dans le stade qui me soutiennent, ça me suffit. Mais bien sûr, s’ils préfèrent faire plus de bruit pour moi que pour elle, ce sera avec plaisir, merci (rires)."
Keys, home sweet home
Expéditive et impressionnante face à la n°3 mondiale en huitièmes de finale, Madison Keys est entrée sur le court Arthur Ashe avec la ferme intention de dicter le jeu et de s'éviter un match à rallonge. Mais après seulement six points disputés (40-40) contre Marketa Vondrousova, les deux joueuses ont vu la partie s'interrompre pendant huit minutes, en raison d’un malaise dans les gradins. Au four et au moulin, l’Américaine s’est empressée d’aller distribuer serviettes et bouteilles d’eau avant de commencer sa marche en avant pour glaner la première manche en seulement 33 minutes.
Au passage, elle a inscrit l’un des points les plus rocambolesques du tournoi. Motivée pour aller se rasseoir en plein échange pensant l'échange facilement dans la poche de son adversaire, elle a vu sa balle heurter le haut de la bande du filet. Incapable de la remettre dans le terrain, Vondrousova a manqué une opportunité de break. Pas la dernière du match...
Des occasions, la championne de Wimbledon en a en effet eu quelques-unes, notamment dans un deuxième set beaucoup plus indécis. Elle n’a malheureusement jamais réussi à être efficace dans les moments importants, ne parvenant notamment pas à convertir une seule de ses neuf balles de break. La Tchèque a pourtant eu cinq chances de mener 5-3 avant finalement de se faire breaker dans le jeu suivant.
Réaliste et surtout très entreprenante, la favorite à l'applaudimètre s’impose finalement en deux manches pour retrouver le dernier carré new-yorkais pour la première fois depuis 5 ans (elle était demi-finaliste à Melbourne en 2022). Egalement finaliste lors de l'édition 2017, elle se sent chez elle à New York. "J'adore jouer ici, le public nous soutient dans n'importe quelle situation. J'ai d'excellents souvenirs de batailles épiques au cours desquelles les gens m'ont poussée. Mon coach me donnait des conseils pendant le match mais je n'entendais absolument rien du tout alors je levais le pouce en lui disant 'Oui OK j'ai compris' alors que pas du tout (rires)" a confié la native de Rock Island.
Un soutien dont elle aura bien besoin pour tenter de déjouer les pronostics face à la future numéro un mondiale, en lévitation depuis le début de la compétition.
L'image du jour : Osaka bientôt de retour
Présente dans les travées de Flushing Meadows afin de participer à un forum sur la santé mentale, Noami Osaka en a profité pour faire le point sur sa situation. Heureuse maman d'une petite Shai depuis deux mois, l'ancienne numéro un mondiale a annoncé son intention de participer à l'Open d'Australie en janvier 2024 ! "C'est un peu comme revoir un vieil ami. J'ai traversé le tunnel des joueurs mais évidemment, je ne joue pas. Ça m'a donné envie mais je suppose que je vais devoir attendre l'année prochaine" a-t-elle expliqué sur le plateau d'ESPN.