Après deux premières tentatives infructueuses à Miami en 2021 et 2023, Jannik Sinner est enfin parvenu à briser le plafond de verre en s’adjugeant le plus beau titre de sa carrière au Masters 1000 de Toronto. De son côté, Jessica Pegula avait déjà connu pareille joie à Guadalajara l’an passé mais son parcours et sa finale impériale confèrent une saveur toute particulière à ce nouveau titre en WTA 1000.
Canada : Sinner récompensé, Pegula impériale
Au terme d’une semaine riche en spectacle et en prestations de haut vol, Jannik Sinner et Jessica Pegula ont été couverts de lauriers au pays de l’érable.
Sinner assume et rêve plus grand
Joueur le mieux classé du dernier carré suite aux éliminations surprises de Carlos Alcaraz et Daniil Medvedev en quarts de finale, Jannik Sinner a parfaitement assumé son statut et ses responsabilités en devenant le deuxième Italien titré en Masters 1000 après Fabio Fognini (Monte-Carlo 2019). Celui qui a mis fin aux très beaux parcours de Gaël Monfils et Tommy Paul – vainqueur du numéro un mondial – n’a jamais tremblé pour infliger une cinquième défaite en autant de confrontations à Alex de Minaur en finale (6/4, 6/1 en 1h29).
Fidèle à sa réputation, le "démon" s’est bien accroché en effaçant deux breaks à 2-0 puis 4-2 dans la manche inaugurale. Mais le volume de jeu, les variations et les attaques fulgurantes du natif de San Candido ont fini par avoir raison de l’Australien qui disputait déjà sa quatrième finale en 2023 (la première de sa carrière en Masters 1000). Beaucoup moins accrocheur dans le deuxième set et auteur de seulement trois coups gagnants sur l’ensemble de la rencontre, le nouveau 12e joueur mondial veut retenir le positif de sa très belle expérience canadienne : "Ça a été une incroyable semaine ici à Toronto. J’ai joué un excellent tennis et ça a renforcé mon appétit. C’était ma première finale à ce niveau et je reviendrai."
La régularité et la rigueur légendaires de Sinner ont donc enfin été récompensées, après deux tentatives infructueuses face à Hubert Hurkacz puis Daniil Medvedev au même stade de la compétition du côté de Miami. "Une finale, c’est toujours un match spécial, a-t-il répété en conférence de presse. Mais quand vous prenez l’habitude de jouer des rencontres aussi importantes, vous êtes plus calme avant et pendant la rencontre. Aujourd’hui, j’ai tout fait mieux que lors de mes deux premières finales en Masters 1000. J’étais très concentré sur moi et sur ce que j’avais à faire […] Gagner un tournoi de ce type est le rêve de tout joueur de tennis. J’ai commencé à y croire depuis l’année dernière parce que j’ai senti que j’avais le niveau pour y arriver et la confiance est quelque chose de très important."
Un nouveau palier franchi avec la manière pour celui qui fêtera ses 22 ans ce mercredi et qui a demandé comme unique cadeau d’effectuer son entrée en lice à Cincinnati ce jour-là… Passionné par le jeu et l’adversité, le désormais 6e joueur mondial (il n’est qu’à 85 points d’Holger Rune dans la hiérarchie) ne jure que par une progression constante et semble avoir largement les moyens de ses nouvelles ambitions. "Ma confiance est boostée avant l’US Open, a-t-il confié. Je vais avoir peu de temps pour m’ajuster à Cincinnati mais j’en aurais pour me préparer le mieux possible pour New York. Avec ce titre, mes attentes vont forcément être plus élevées. Mais je pense que j’ai encore de la marge pour améliorer des choses dans mon jeu et pour mieux appréhender certaines situations."
Des démonstrations et un premier grand titre qui incitent en effet à écrire le nom du quart de finaliste de l'édition 2022 en bonne place dans la liste des prétendants sérieux au dernier Grand Chelem de la saison.
Pegula à sens unique
Si le sacre du Transalpin ne souffre d’aucune contestation, que dire du succès tout aussi prestigieux de Jessica Pegula à Montréal ? En balayant Liudmila Samsonova (6/1, 6/0 en 49 minutes) en finale, elle est devenue la première Américaine à soulever ce trophée depuis Serena en 2013 et la troisième à compter plusieurs WTA 1000 à son palmarès après les sœurs Williams.
Certes, en raison des mauvaises conditions climatiques, son adversaire a dû boucler sa demi-finale face à Elena Rybakina deux heures avant cette ultime confrontation. Désavantagée physiquement et psychologiquement, la nouvelle 12e joueuse mondiale – qui s’est également offert les scalps d’Aryna Sabalenka et de Belinda Bencic lors de cette aventure mémorable – n’a jamais pu rivaliser avec "JPeg", chef d’orchestre d’une symphonie jouée sans aucune fausse note. "Objectivement, elle n’était pas au mieux physiquement mais en même temps, j’ai disputé une partie très propre, a-t-elle analysé à l’issue de la rencontre. Je n’ai pas fait beaucoup d’erreurs ou de fautes directes, j’ai joué libérée et j’ai poussé pour breaker et tenir cette cadence jusqu’à ce que je gagne. J’ai joué un match parfait."
Au-delà de la largesse du score, l’impression de domination totale est confirmée par les chiffres puisque Pegula a remporté plus du double de points (51 contre 21), n’a fait que trois fautes directes et n’a pas perdu le moindre point derrière sa première balle ! Un récital de justesse et d’agressivité en guise de cerise sur le gâteau pour celle qui a éliminé coup sur coup son amie récemment titrée à Washington Coco Gauff et Iga Swiatek.
Deux succès prestigieux et libérateurs puisque l’Américaine a gaspillé des opportunités de conclure dans la deuxième manche face à la numéro un mondiale puis s’est retrouvée menée 4-2 dans le set décisif avant de définitivement retourner la situation. "C’était très difficile de battre consécutivement Coco et Iga, a-t-elle poursuivi. Réussir ça et jouer ensuite un match très propre en finale, c’est vraiment génial. Je n’ai pas ressenti beaucoup de pression et je n’ai jamais été inquiète."
Alors que observateurs et spectateurs se réjouissent depuis quelques mois de la naissance d’un Big 3 féminin, Jessica Pegula a de nouveau prouvé qu’elle avait le talent et les qualités pour avoir voix au chapitre. Et si contrairement à ses concurrentes, elle n’est encore jamais parvenue à passer le stade des quarts de finale en Grand Chelem, nul doute que son abnégation et la confiance acquise avec ce nouveau titre l'aideront à briller à domicile dans 15 jours.
"Toute l’année, on est sur le circuit pour gagner des titres mais le tennis est un sport très difficile et on perd parfois beaucoup, a-t-elle très justement expliqué. Même lorsque vous gagnez beaucoup de matchs, vous ne remportez pas forcément de tournois donc c’est dur. Être titrée après une semaine comme ça prouve que tout ça vaut la peine et donne envie de tout faire pour gagner plus."
Et maintenant Cincinnati
Alors que l’US Open approche à grands pas, les stars des circuits WTA et ATP livreront une nouvelle répétition générale cette semaine à Cincinnati. Toujours sur le toit du monde, Carlos Alcaraz aura à cœur de faire mieux qu’à Toronto pour se maintenir sur le trône et prendre pleinement confiance avant de se lancer dans la défense de son titre. "Je sais que je n’ai pas bien joué, a-t-il admis suite à sa défaite face à Tommy Paul. A moi de tirer les leçons de ce tournoi et de m’entraîner. Pour l’instant, je vais bien me préparer pour Cincinnati."
Absent du circuit depuis sa frustrante défaite en finale de Wimbledon, Novak Djokovic mènera la danse dans l'autre partie de tableau. Le Serbe, qui a profité de ces dernières semaines pour recharger les batteries et peaufiner sa préparation, vise ni plus ni moins qu’un 24e titre en Majeur et la place de numéro un mondial d'ici quelques semaines.
Chez les dames, Iga Swiatek aura à cœur de réasseoir son autorité suite à sa surprenante perte de contrôle dans le dernier carré à Montréal. La reine de la WTA a été placée dans la même partie de tableau qu’Elena Rybakina et que la tenante du titre, Caroline Garcia. A noter le premier tour immanquable entre deux mamans comblées et qui visent à nouveau les sommets : Elina Svitolina et Caroline Wozniacki, qui a réussi son come-back après trois ans et demi d'absence.