Tout aussi réjouissants que ceux disputés la veille, les derniers huitièmes de finale ont livré leur verdict ce lundi sur les courts de Flushing Meadows. De quoi assurer de très beaux feux d'artifice entre favoris dans le Top 8...
US Open 2024 – J8 : prêt(e)s pour les choses sérieuses
Jessica Pegula et Daniil Medvedev défieront les boss du circuit en quarts de finale.
Le grand défi de Pegula
Eliminée au deuxième tour de Wimbledon et des Jeux Olympiques après avoir manqué l’intégralité de la saison sur terre battue en raison d’une blessure, Jessica Pegula (n°6) aurait pu vivre un été sans saveur ni gloire. Mais le retour sur dur nord-américain a complètement changé la donne. Titrée à Toronto – où elle se sent comme chez elle – puis finaliste à Cincinnati, elle a débarqué à New York avec le statut d’outsider crédible et les attentes qui vont avec.
Des espoirs bien vivants à l’issue de sa nouvelle victoire sans concéder le moindre set face à la dangereuse Diana Shnaider en huitièmes de finale (6/4, 6/2 en 1h27). "Je sens qu’il y a plus de pression cette année en raison de ma forme et de ce que j’ai réussi avant de débuter ce tournoi, a-t-elle confirmé. J’ai l’impression d’avoir eu mes meilleures sensations aujourd’hui. Je veux continuer à travailler de cette manière et, j'espère jouer mon meilleur tennis pour les prochains tours. Il y a toujours beaucoup de pression ici, mais c’est sympa, j'aime ça. C’est toujours agréable d’être une Américaine à l’US et de recevoir tout ce soutien."
Voir l’une des joueuses les plus constantes du circuit rallier les quarts de finale de ce dernier Grand Chelem de l’année n’est donc pas une surprise. Mais les interrogations quant à la suite sont légitimes au vu du passif de "Jpeg", qui n’est jamais parvenue à briser ce plafond de verre lors de ses six précédentes tentatives. "Comme je dis toujours, je dois juste gagner le match pour atteindre les demi-finales et ça règlera tout, a-t-elle souri. Tout ça a peu d’importance pour moi, chaque match est un nouveau défi. C’est comme ça que je le vis. Il se trouve que le prochain est un quart de finale. Mais en même temps, pouvoir dire que j’ai été dans cette position de nombreuses fois, c’est génial. Je dois juste continuer à me mettre dans de bonnes conditions et à essayer de jouer mon jeu."
L’autre problème, c’est que sa future adversaire se nomme Iga Swiatek et qu’elle l’a déjà privée du dernier carré à trois reprises dont deux fois en 2022, sur la route de ses titres à Roland-Garros et ici-même. Qui plus est, la numéro un mondiale est quasi intouchable depuis le début de cet US Open, à l’image de son succès net et sans trou d’air face à Liudmila Samsonova (6/4, 6/1 en 1h30). Si elle a dû attendre le 10e jeu de la rencontre pour faire une première différence, elle n’a de nouveau pas concédé la moindre balle de break, une constante depuis trois matchs. "Au début, j’avais l’impression que nous jouions un match de tennis masculin, en conservant notre engagement à chaque jeu, a-t-elle analysé. Mais je savais que si je continuais à pousser, j'aurais des chances de prendre son service. Dans le deuxième set, je voulais juste rester concentrée et ne pas laisser mon esprit s'égarer."
La joueuse la plus prolifique de la saison (57 victoires au compteur) entrera sur le court pour disputer son 9e quart de finale en Majeur avec un net avantage psychologique puisqu’elle mène 6-3 dans leurs confrontations, ce qui ne l’empêche pas de se méfier. "Contre Jessie, ce n’est jamais facile. Ce sera un match difficile parce qu’elle frappe beaucoup à plat et qu’il faut être prête pour les longs rallyes. Elle est dans le bon rythme en ce moment et elle a gagné tellement de matchs ces dernières semaines…" Sans doute un beau challenge pour "1ga" mais assurément le plus grand défi possible pour Pegula.
Une finale avant l’heure
Dans un tableau orphelin de Carlos Alcaraz et de Novak Djokovic, les deux grands favoris de cette édition 2024 ne sont autres que Jannik Sinner (n°1) et Daniil Medvedev (n°5). Le premier est confortablement installé au sommet du tennis mondial et reste sur un trophée brillamment soulevé à Cincinnati. Le deuxième est LE spécialiste des courts en dur (268 victoires depuis 2018, record absolu devant Andrey Rublev, 210…) et seul champion encore en lice chez les messieurs. Problème : les deux hommes vont s’affronter dès les quarts de finale.
Premier des deux joueurs à entrer sur le court Arthur Ashe ce lundi, le finaliste de la dernière édition n’a pas fait dans la dentelle pour se défaire de l’invité surprise Nuno Borges (6/0, 6/1, 6/3 en 1h51). Mis à part un break concédé d’entrée de troisième manche, "Meddy" a rendu une copie impeccable : 20 fautes directes (contre 51 pour le Portugais), une seule balle de break concédée et 57% de points gagnés sur le service adverse. A l’occasion du Labor Day (équivalent de notre fête du travail aux Etats-Unis), il n’a pas eu besoin de puiser dans ses ressources afin de rallier le Top 8 pour la 11e fois de sa carrière en GC. "J'essaie de travailler dur. Parfois je le fais, parfois je ne le fais pas, a-t-il plaisanté avec Nick Kyrgios en fin de match. Il y a des jours où il est plus difficile d'aller sur le court et de s'entraîner mais j’ai en tête que si le gars en face s’entraîne plus que moi, j’ai moins de chance de gagner et je veux tout le temps gagner. J’essaie donc de m’entraîner autant que possible […] J’ai connu beaucoup de succès ici à l’US Open et la dernière fois que j’ai perdu en huitièmes de finale, c’était contre toi. Un très bon souvenir (rires)."
S’il s’est montré moins expéditif, son futur adversaire a lui aussi fait forte impression face à Tommy Paul (n°14), un opposant d’un tout autre calibre (7/6(3), 7/6(5), 6/1 en 2h42). Comme lors de son entrée en lice, le patron du circuit est entré timidement dans la partie, se retrouvant même mené 1-4, double break. Mais au contraire de son premier tour, il n’a pas attendu de perdre le set inaugural pour se remettre sur les rails, au grand dam des bruyants supporters de l’Américain. Challengé pendant une bonne partie de la rencontre par un adversaire qui a tout tenté pour le déborder, Sinner n’a jamais semblé inquiet ou à court de solutions. "Mentalement, je n’ai pas très bien commencé, a avoué le vainqueur. J’avais un double break de retard dans le premier set mais j’ai essayé de rester présent mentalement et c’est certainement l’une des clés de ma victoire. Il y a eu des hauts des bas, ce qui est normal dans un match en cinq sets mais j’espère que le fait de vraiment avoir trouvé mon rythme en fin de match m’aidera pour le suivant."
Le prochain justement sera donc une belle en 2024 en Grand Chelem face à Medvedev. Battu au terme d’un scénario déchirant en finale de l’Open d’Australie, le protégé des deux Gilles avait pris sa revanche en quarts au All England Club. Mais au vu de sa forme et de ses nombreux accomplissements cette année, le huitième joueur à atteindre ce stade de la compétition dans tous les Majeurs d’une même saison depuis 2000 partira légèrement favori. "Ce sera un match difficile, il y aura de nombreux rallyes donc j’espère que je serai prêt physiquement, a expliqué Sinner. J’ai gagné en Australie et il a gagné à Wimbledon, à chaque fois en cinq sets. Donc j’espère que ce sera encore un bon match. On va essayer de faire de notre mieux." Une finale avant l’heure à ne manquer sous aucun prétexte.
Draper et De Minaur, une chance à saisir
Lorsqu’une telle occasion se présente, il ne faut surtout pas la laisser passer. C’est sans doute avec cet état d’esprit que Jack Draper (n°25) a pénétré sur le court Louis Armstrong. Mieux classé que son adversaire du jour, le Britannique n’était pour autant pas le grand favori de son duel face à Thomas Machac. La faute à un bilan négatif (3 défaites lors de leurs trois premières confrontations) et à la forme étincelante du Tchèque, qualifié pour son premier huitième de finale en Grand Chelem sans perdre la moindre manche.
Mais le gaucher a pris les choses en main pour ne laisser que des miettes à son vis-à-vis et ainsi devenir le premier Britannique à rallier les quarts à l’US depuis Andy Murray en 2016. "Nos précédentes rencontres avaient été de belles batailles, a concédé le vainqueur. J’ai joué à un bon niveau et lui était sans doute en dessous de son niveau habituel mais je devais rester fort. C’était incroyable de jouer sur ce court, j’avais perdu ici au même stade l’an passé donc c’est sympa d’être de retour et de faire mieux."
Un nouvel objectif de carrière brillamment coché qu’il tentera de sublimer contre Alex de Minaur (n°10). S’il a perdu un set, le "démon" a mis un terme au surprenant parcours de son compatriote Jordan Thompson (6/0, 3/6, 6/3, 7/5 en 2h57). Contraint de déclarer forfait avant son quart de finale à Wimbledon face à Novak Djokovic en raison d’une blessure à la hanche survenue dans les derniers de sa victoire face à Arthur Fils, l’Australien s’est donc offert une nouvelle occasion de rallier pour la premier fois de sa carrière le dernier carré. Une opportunité en or, contre un joueur qu’il a battu lors de leurs trois précédents duels. "Nous n’avons jamais joué l’un contre l’autre au meilleur des cinq manches. Ce sera un match complètement différent parce qu’il évolue à un excellent niveau cette année. Je m’attends à une bataille parce qu’il est très rusé mais je vais faire de mon mieux et mettre tout mon cœur dans cette partie."
Karolina Muchova confirme son come-back
Sur le papier, lorsqu’une joueuse classée au-delà du 50e rang mondial élimine la tête de série n°5 en huitièmes de finale d’un Grand Chelem, on appelle ça un choc, voire un mini-séisme. Mais lorsque la protagoniste en question se nomme Karolina Muchova, l’effet de surprise s’amenuise nettement. Enfin libérée d’une blessure au poignet qui l’a éloignée des courts pendant dix mois, la demi-finaliste sortante a de nouveau livré une partie de haut-vol pour mettre un terme au magnifique défilé printemps / été de Jasmine Paolini (6/3, 6/3 en 1h09).
Sous pression et en léger manque de repères en début de match, l’artiste tchèque s’est retrouvée menée 1-3 suite à quelques erreurs et un manque de dextérité bien inhabituel. Ensuite ? Elle a trouvé son rythme et fait étalage de sa palette, aussi large qu’enthousiasmante. "Le plan était d’essayer de jouer mon jeu mais je dois dire que j’étais un peu nerveuse au début de la rencontre, a admis l’heureuse gagnante du jour en bord de court. Il y avait un peu de vent aussi donc je devais réussir à bien sentir la balle. Jasmine est une joueuse incroyable et je suis simplement très heureuse que ça marche de nouveau pour moi ici !"
Très solide au service, notamment dans la deuxième manche (deux petits points perdus, 92% de points gagnés sur sa première balle), elle a également enthousiasmé le public du court Louis Armstrong par ses volées déposées (11/14 au filet), ses slices, ses amorties et ses passings tranchants. "Les hot shots ? C’est la seule chose que je travaille à l’entraînement en fait (rires). Non, c’est aussi de la chance, parfois ça marche… J’aime jouer, j’aime réussir des coups sympas et il y en a eu quelques-uns ici !". Une solidité et du talent qui lui ont offert un quatrième succès sans perdre la moindre manche synonyme de 6e quart de finale en Grand Chelem, un accomplissement qu’elle n’osait imaginer il y a encore quelques mois. "Honnêtement, je ne pensais pas à ce qui pouvais arriver lorsque j’étais blessée. Ça a été la plus sérieuse et la pire blessure de ma carrière mais dans ma tête, je me disais juste que j’allais essayer de faire au mieux. Et voilà où j’en suis maintenant."
Au prochain tour, elle affrontera Beatriz Haddad Maia (n°22), tombeuse de l’ancienne n°1 mondiale Caroline Wozniacki au terme d’un match très éprouvant physiquement (6/2, 3/6, 6/3 en 2h41). Celle qui avait déjà marqué l’histoire de son pays lors de son formidable parcours à Roland-Garros 2023 est devenue la première joueuse brésilienne à atteindre les quarts de finale à New York depuis Maria Bueno en 1968.